Silence on tue

 

« Un peuple prêt à sacrifier un peu de liberté pour un peu de sécurité ne mérite ni l’une, ni l’autre et finit par perdre les deux », disait Benjamin Franklin. Les Sfaxiens ont perdu et la liberté et la sécurité sanitaire à cause d’une décision aussi injuste que criminelle : l’implantation d’une usine pollueuse tueuse à trois kilomètres du centre ville. Aujourd’hui, le Sfaxien a l’impression d’être quelqu’un à poils à qui on demande de vider les poches ! Le citoyen qui habite sur la côte, n’a aucune possibilité de se baigner, aucune possibilité de loisirs, aucune possibilité de culture, c’est l’errant qui contemple sa mer contaminée par les produits les plus toxiques, qui constate sa forêt s’asphyxier à vue d’œil, et qui respire malgré lui un air chargé des gaz toxiques les plus nocifs de la planète !
Rappelons tout d’abord que la commission mondiale sur l’environnement et le développement, a défini comme développement durable, tout développement qui répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures à répondre à leurs propres besoins ! Il est donc sacré d’assurer la pérennité du milieu naturel et humain sans mettre en danger la santé des citoyens ! Or, ce qui s’est passé et ce qui se passe encore à Sfax est tout à fait le contraire de cette logique élémentaire. Depuis au moins cinq décennies, le revers environnemental occasionné par la SIAPE est devenu un réel crime contre l’humanité : pollution de la terre, de la mer et de la nappe avec des taux de contamination en fluor, phosphate et métaux lourds qui dépassent de plus de cent fois les normes courantes dans le pays !
Le groupe chimique a compris le drame qu’il a causé aux habitants de la deuxième grande ville du pays depuis des décennies puisqu’il a commencé très tôt à dédommager des agriculteurs de AIN FELLAT, et on cite un riverain qui a refusé le dédommagement de la terre, mais qui a exigé et obtenu un dédommagement sur la récolte sans renoncer à son titre de propriété. IL faut rappeler que la passivité de l’administration de tutelle depuis le temps est terrifiante. Comment pourra-t-on expliquer à des centaines de milliers de jeunes que leurs grands parents leurs ont légué une industrie en plein centre ville avec une montagne de phosphogypse couvrant 50 hectares, tuant et agressant tout ce qui vit ; et comment leurs expliquer en 2015 qu’ils doivent accepter pour eux et pour leurs progénitures le même sort sans rouspéter, et ce au nom des intérêts d’un groupe égoïste qui veut assurer ses rentes sur le dos de la santé d’êtres humains ? Ce groupe qui ne recule devant rien, grâce à un lobby super puissant, et qui n’acceptera aucun plan qui soit contraire à ses intérêts sauf si la décision venait de l’administration de tutelle qui aura une occasion ultime de se racheter et de faire amende honorable ! Ce groupe de la chimie assassine a atteint gravement l’intégrité environnementale, physique et bien entendu morale de toute une ville qui a été depuis l’indépendance la vache à lait des gouvernements successifs ! Et même de ce côté, la pollution a rattrapé l’histoire, SFAX serait d’après les dernières statistiques, la première ville en chèques sans provisions –sic-.
Il faut que quelqu’un mette à plat, bien à l’horizontale, tous les éléments qui constituent la règle de trois : secret, silence, solidarité … Le chaudron à ébullitions cache une économie souterraine florissante que les autorités feignent de ne pas voir ? Si cela ne tenait qu’aux quelques centaines d’emplois menacés par la fermeture de la SIAPE, il serait des plus aisés de les indemniser d’abord et de les recaser ensuite dans des postes plus civilisés et plus dignes. Difficile de comprendre comment les dégâts humains et écologiques n’éclaboussent pas les yeux des responsables, et ne hurlent pas dans leurs oreilles ? Le sursaut citoyen pourra seul, assécher le terreau où peut germer le terrorisme environnemental. Les mouvements citoyens de ces derniers jours ont donné de l’urticaire aux responsables de la SIAPE, ce qui les fait bouger par intermédiaires pour tenter une énième diversion, un énième mensonge ! Les citoyens de SFAX ont compris que les pollueurs, sont civilement et pénalement responsables des manquements et des atteintes aux conventions nationales et internationales qui légifèrent les actions humaines sur la nature et sur la biosphère. Des valets sans scrupules tentent de diluer ça et là que des solutions miracles ont été trouvées pour continuer l’activité assassine sans risques. C’est un discours particulièrement répugnant qui consiste à proposer : Pile je gagne, Face tu perds ! Non cette diversion ne passera pas, « game over », car il appartient à la ville et à ses citoyens de décider pour leur avenir, et non à un pollueur tueur qui ne s’est pas gêné d’ignorer les souffrances de centaines de milliers d’innocents, puisque c’est l’opinion qui tranche in fine ! Cette opinion a dit son mot : elle veut récupérer l’espace qui lui permettra de réaliser son extension avec des industries High Tech, des espaces de loisirs et de culture qui rapporteront à la ville et à l’Etat des ressources beaucoup plus importantes que les produits toxiques qui attérissent dans les poumons des êtres humains. SFAX, riche de son histoire, de son inventivité et de la force de sa jeunesse qui a décidé de reprendre ses droits, va pouvoir enfin se réconcilier avec ses générations et avec elle-même !

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