Les infrastructures des écoles de plusieurs régions intérieures laissent à désirer en Tunisie, et c’est le ministre de l’Education, Hatem Ben Salem, qui l’a affirmé à maintes reprises. Profondément touchée par les conditions de vie déplorables de ses élèves, une institutrice à Kesra, relevant du gouvernorat de Siliana, a rédigé une lettre émouvante à l’adresse du ministre de l’Education, dans laquelle elle souligne, notamment, l’extrême pauvreté de ses élèves.
L’institutrice, notons-le, se déplace à l’aide d’une chaise roulante.
« J’enseigne dans une zone dont la beauté n’a d’égale que sa marginalisation. Notre héroïsme est timide et doux. Il est notable au quotidien, tout au long de l’année scolaire. Un héroïsme dévoré par les conditions extrêmes de l’hiver. J’entre, chaque jour, au sein d’une salle de classe déprimante, froide, tel un petit soleil pour réchauffer l’ambiance. Je dois trouver la force nécessaire pour regarder ces petits visages tristes qui se tournent à chaque fois pour suivre mes mouvements entre la porte de la classe et les fenêtres brisées.
Pour la plupart de ces élèves, le père surveille un immeuble ou travaille dans un chantier. La mère, pour sa part, passe sa journée dans les montagnes à ramasser du pin d’Alep ou accomplir d’autres tâches anarchiques et éprouvantes. Ils ne savent rien de leurs enfants. Tout ce qu’ils savent, c’est qu’ils ont payé leurs études et que leurs enfants se rendent à l’internat le soir. Dans ce contexte, il faut être, à la fois, la maman et le papa de ses élèves. Il faut être ce refuge pour leurs cœurs fragiles. Une élève peut avoir l’esprit ailleurs. Je l’interroge pour en connaître la raison et elle me répond avec un sourire las et triste, dessiné sur son visage grâce à l’intérêt que je lui ai témoignée […]. C’est notre histoire. Les héros sont des enfants qui, par leur patience, ont fait pleurer les montagnes. Des enfants qui supportent la douleur de la distance qui les séparent de leurs parents. Ils ont du mal à trouver de l’argent à dépenser chaque jour, ne serait-ce que pour acheter une bouteille d’eau ou un goûter. Ils font face à des températures qui atteignent le 0 degrés, parfois moins. lls se lavent avec une eau toute aussi glaciale.
Face à cette situation, le ministre de l’Education n’a pas encore chargé le services scolaires d’élaborer un projet en vue de réaménager les internats des régions intérieures, notamment les régions montagneuses […] »