Sommes-nous au bout de nos peines économiques ?

C’est la question que nous sommes en droit de nous poser en analysant les résultats publiés cette semaine sur les dernières performances de notre économie. En effet, les bonnes performances ne manquent pas, accompagnées de discours politique et d’autosatisfaction de la part des pouvoirs publics, sur l’amélioration de la situation économique à mettre au crédit d’un gouvernement qui doit poursuivre son œuvre salutaire et échapper aux tergiversations politiques.
Qu’en est-il au juste et où en sommes-nous en matière de performances économiques au-delà des discours et de quelques tentatives de récupération politique ?
Commençons d’abord par les performances en matière de croissance. Les chiffres publiés par l’Institut national des statistiques montrent une progression de la croissance de 2,5% au cours du premier trimestre de l’année en cours par rapport au premier trimestre de l’année 2017. Il s’agit de la performance la plus importante depuis 2015. L’agriculture a encore joué un rôle essentiel dans cette performance économique globale, ainsi que les industries agroalimentaires suite à une excellente campagne oléicole. Ainsi, la croissance agricole a été de 11,9% lors du premier trimestre 2018 et celle des industries manufacturières de 2,4%.
Mais, d’autres secteurs ont également contribué à ces performances et notamment celui des services marchands avec une croissance de 3,3% au cours du premier trimestre, tirée par les bons résultats du secteur touristique et le retour en grâce de la destination Tunisie. Manque à cet appel de la croissance, le secteur des industries manufacturières qui a enregistré des performances négatives de -5,3% au cours du premier trimestre miné par les conflits sociaux dans le secteur minier et autour des phosphates.
Ainsi, les performances de ce premier trimestre sont plutôt de bonne facture. Mais, elles incitent plutôt à la prudence dans la mesure où elles restent faibles avec un effet conjoncturel relativement important lié à une bonne campagne agricole. Ainsi, les estimations de la croissance sans cet effet sont en dessous de 2%. Par ailleurs, un élément essentiel qui pèsera sur l’avenir de la croissance au cours de cette année concerne le retour de l’investissement.
Or, les résultats ne sont pas probants dans la mesure où les déclarations d’investissement ont baissé de 35% au cours de ce premier trimestre.
Un autre élément relatif à cette amélioration de l’environnement économique concerne le front de l’emploi. En effet, l’amélioration des performances de croissance s’est traduite par une légère amélioration de l’emploi avec une baisse du taux de chômage qui est passé de 15,5% à 15,4% au cours du premier trimestre de l’année en cours. Mais, en dépit de cette amélioration, il faut souligner que le chômage se maintient à des niveaux très élevés et constituera l’un des défis les plus importants pour les pouvoirs publics lors des prochaines années.
Une autre série de résultats publiés lors des derniers jours s’inscrit dans la même tendance. Il s’agit de ceux du commerce extérieur avec une progression des exportations beaucoup plus marquée que celle des importations au cours des quatre premiers mois. En effet, la croissance des importations a été de 12% et celle des exportations de 0,8%, ce qui a amené une amélioration du taux de couverture du commerce extérieur qui est passé de 66 à 73% au cours des quatre premiers mois entre 2017 et 2018.
Clairement, nous sommes en présence d’un léger frémissement de notre économie lors du premier trimestre de l’année en cours. Mais, ce frémissement reste fragile et dépend de certains facteurs conjoncturels, notamment la bonne campagne agricole dont l’effet peut s’estomper au cours des mois à venir.
Toute la question qui se pose aujourd’hui est de savoir comment lui donner le souffle nécessaire afin de l’inscrire dans la durée et sortir ainsi de la crise actuelle. Plusieurs éléments sont à réunir. Le premier d’entre eux est plutôt d’ordre politique et concerne la levée de l’hypothèque politique et l’incertitude qui règnent sur l’avenir du gouvernement actuel et les conditions pour parvenir à une certaine stabilité politique lors des prochains mois. Le second élément essentiel concerne la capacité des pouvoirs publics à réunir deux aspects essentiels absents jusque-là dans l’action publique, à savoir la cohérence entre une vision économique claire et globale avec une capacité et une plus grande audace dans l’action.
Ces conditions permettront à notre pays de sortir de la crise actuelle, d’ouvrir de nouveaux horizons à la transition économique et de construire les fondements d’une transition démocratique réussie et apaisée. n

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