Avec le bouleversement qui secoue la géopolitique depuis quelques années, les sommets régionaux se multiplient. À peine deux semaines seulement après le Sommet des BRICS – ou plutôt, les BRICS+ désormais compte tenu des nouveaux membres -, le G20 va organiser, ce week-end, son propre sommet. Et la présidence, cette année, a été confiée à l’Inde. D’ailleurs, pour les autorités indiennes, conscientes de leur poids géopolitique et économique croissant, tout doit être parfait pour prouver sa capacité d’accueillir de tels événements multilatéraux.
L’absence très remarquée de la Chine
S’il faut retenir une chose essentielle de ce sommet du G20, c’est que la Chine, habituellement présente, sera justement absente. Faut-il rappeler que l’Empire du Milieu est la star incontestable des BRICS+ et même sur le plan international. Depuis plusieurs années, ses relations avec les États-Unis, qui seront présents au G20, sont très tendues: le dossier du Taïwan, le possible soutien à la Russie, la guerre des semi-conducteurs, la guerre commerciale, technologique… Les sujets qui séparent les deux superpuissances sont plus nombreux que ceux qui les réunissent.
Selon les observateurs, l’absence du président chinois, Xi Jinping, est un message fort adressé aux États-Unis et à l’Occident en général: la Chine ne veut plus de son statut d’outsider. Elle se veut une puissance à part entière, sur un pied d’égalité avec les States, qui rejette l’ordre mondial actuel.
L’absence de la Russie, pour sa part, est prévisible. Le pays est en conflit indirect avec les États-Unis et l’OTAN à travers la guerre en Ukraine. De plus, Vladimir Poutine, président russe, fait l’objet d’un mandat d’arrêt international. Même s’il ne faisait pas l’objet d’une telle mesure judiciaire, on le voit mal débarquer en plein sommet du G20 pour rencontrer ses pires ennemis, à moins que ce ne soit uniquement dans l’objectif de les narguer.
La position de l’Inde reste la plus ambigüe. Le pays est un pilier des BRICS+, mais il fait partie de ceux qui ne souhaitent pas tourner le dos à l’Occident et aux États-Unis. L’inde adopte une politique comparable à celle que Royaume-Uni avait adoptée lorsqu’il était membre de l’Union Européenne : un pied au sein de l’Union, un pied dehors. De plus, une rivalité règne entre l’Inde et la Chine. Un jour ou l’autre, il faudra à l’Inde choisir son camp car, pour le moment, la Chine reste le leader incontestable des BRICS et des concurrents de l’Occident.
L’Union Africaine au sein du G20
L’autre nouveauté à signaler à propos du sommet du G20 concerne les 55 États de l’Union Africaine. Cette dernière va acquérir le même statut que celui de l’Union Européenne, à savoir « une organisation internationale invitée ». Rappelons que, jusqu’alors, seule l’Afrique du Sud est présente au G20.
L’information n’a pas encore été officiellement confirmée, y compris par le porte-parole de la présidence de l’Afrique du Sud qui a été interrogé sur le sujet par Reuters. Il affirme qu’aucun commentaire ne sera fait avant l’annonce officielle. Ce pas vers l’Union Africaine serait, selon certains observateurs, une contre-offensive destinée aux rivaux des États-Unis qui cherchent eux aussi à se rapprocher de l’Afrique et de ses richesses (Russie, Chine…).
Il convient de rappeler que l’Afrique cherche, aujourd’hui, à faire entendre sa voix, refusant le statut du continent exploité par les Occidentaux. En témoigne, par exemple, l’organisation du dernier sommet sur le climat au Kenya qui vise à apporter des propositions unifiées lors de la COP d’Abu Dhabi de décembre 2023 ou encore l’éviction des présidents fidèles aux Occidentaux au Mali, au Niger ou encore au Gabon.
L’Union Africaine, soulignons-le aussi, totalise un PIB de 3000 milliards de dollars, en plus de son poids démographique incontestable, de ses ressources naturelles et du potentiel de sa jeunesse. Malgré son envergure, le continent reste absent dans tant d’institutions internationales, à commencer par le Conseil de Sécurité de l’ONU. Celui-ci ne compte aucun membre permanent issu de notre continent, ce qui est considéré comme une discrimination flagrante par de nombreux observateurs.
Ce qui est certain, à présent, c’est que l’ordre mondial est en train de se redessiner. Les États-Unis et leurs partenaires ne sont plus les seuls rois incontestables du globe. De nouvelles puissances, autrefois opprimées et sous-estimées, veulent faire parler d’elles et réclament leurs places respectives.
F. K