La pandémie de la Covid-19 a ouvert une ère nouvelle dans les relations économiques. En effet, parallèlement à ses effets dévastateurs au niveau sanitaire, la pandémie a eu des effets économiques sans précédent sur l’économie mondiale. Tous les pays du monde ont connu une récession très sévère au cours de l’année passée. Or, si les pays développés ont pu mettre à profit leurs institutions pour faire face à cette pandémie en mettant en place une politique monétaire et des politiques budgétaires expansionnistes pour atténuer les effets de la récession, les pays en développement, particulièrement les économies africaines, se sont trouvés démunis et incapables de faire face aux effets économiques et financiers de la crise. En effet, si les effets sanitaires n’ont pas été de la même ampleur que ceux enregistrés dans les pays développés, la pandémie de la Covid-19 a eu des effets économiques et financiers considérables. Ces économies ont traversé une récession sans précédent qui a eu des effets majeurs sur leurs finances publiques, particulièrement sur les dettes publiques, menaçant de mettre beaucoup d’entre elles au bord du défaut de paiement. Cette crise financière est d’autant plus forte que les pays en développement ne disposent pas d’institutions solides capables de résister aux vulnérabilités financières qu’ils sont en train de traverser.
Dans ce contexte, la communauté internationale s’est saisie de la question de l’impact de la pandémie sur les pays en développement, particulièrement les pays africains. Ainsi, le G7, le G20 et les institutions internationales ont fait de la question de l’appui aux pays en développement, particulièrement les pays africains, une de leurs priorités au cours de l’année passée. Cet appui s’est fixé deux grandes priorités : le soutien des pays africains pour l’accès aux vaccins à travers la mise en place de la facilité Covax et l’initiative Avatt de l’Union africaine, et l’appui aux finances publiques par le biais notamment d’un report des paiements au titre du service de la dette.
C’est dans ce contexte que s’inscrit le Sommet sur le financement des économies africaines à l’invitation du Président Emmanuel Macron qui a eu lieu le 18 mai 2021 à Paris. Ce Sommet a vu la participation d’un grand nombre de pays africains, ainsi que la Commission de l’Union africaine et des plus hauts responsables de l’Union européenne.
Notre pays et le Président Kaïs Saïed ont pris part à cet important Sommet. La question est de savoir quelles sont les retombées possibles pour notre pays.
De notre point de vue, on peut évoquer cinq grands bénéfices pour la Tunisie à la lecture des principales conclusions de ce Sommet.
La première retombée et probablement la plus importante est d’ordre politique et concerne l’invitation de notre pays et de tous les pays intermédiaires africains à prendre part à ce Sommet. Il faut rappeler que toutes les initiatives se sont limitées par le passé aux pays africains les moins avancés et n’ont pas intégré les pays intermédiaires comme les nôtres. L’ouverture de ces rencontres à notre pays et à ceux à revenu intermédiaire est une prise de conscience de la part de la France et de la communauté internationale que ces pays traversent également une crise économique majeure suite à la pandémie, et leur disposition à élargir les formes d’aide et d’appui envisagées pour les pays les moins avancés aux pays intermédiaires. Il s’agit d’une opportunité importante dont il faudrait tirer bénéfice dans le contexte difficile que nous traversons.
La seconde conclusion est liée à l’engagement de la France et de la communauté à favoriser l’accès de nos pays aux vaccins et notamment à les produire localement. Il s’agit également d’un engagement important dont on devrait tirer bénéfice particulièrement dans ce contexte marqué par la difficulté d’accès aux vaccins pour notre pays.
La troisième concerne la décision d’augmenter les ressources du FMI et de relever les Droits de tirages spéciaux (DTS) à 650 milliards de dollars. Sur ce total, 33 milliards de dollars reviendront à l’ensemble des pays africains. Ce montant reste en dessous des besoins des pays africains estimés par l’institution de Bretton Woods à près de 300 milliards de dollars. Mais, en même temps et pour augmenter les ressources mises à la disposition des pays africains, le Sommet a appelé les pays développés à mettre une partie de leurs DTS à la disposition des pays africains. Notre pays bénéficiera de la nouvelle création de DTS qu’il mettra au service de son financement international.
La quatrième conclusion importante porte sur la question de la dette et l’engagement de la communauté internationale de poursuivre le report du service de la dette pour les pays africains les moins avancés. Ces résultats sont nettement en dessous de nos attentes et de la gravité des situations des finances publiques dans la plupart des pays. A ce niveau, il est important de poursuivre la mobilisation pour parvenir à des propositions plus audacieuses avec l’annulation des dettes et l’élargissement de ces initiatives aux pays intermédiaires dont la Tunisie.
La dernière conclusion concerne l’encouragement du secteur privé et son développement ainsi que des investissements directs étrangers sur le continent. Ces initiatives devaient bénéficier de la restructuration des chaînes de valeur au niveau régional et la sortie de la globalisation effrénée des années passées.
Le Sommet de Paris a constitué un pas supplémentaire dans la prise en compte par la communauté internationale de l’impact sanitaire, économique et financier de la pandémie de la Covid-19 sur les pays pauvres. Si les efforts de la communauté internationale sont importants et constituent une manifestation de la solidarité et de la coopération internationale, ils doivent être renforcés et faire preuve de plus d’audace dans l’appui aux pays en développement face à la pandémie.