Dans la présentation de sa nouvelle équipe devant l’Assemblée des représentants du peuple pour le vote de confiance, le Chef du gouvernement Youssef Chahed est revenu sur la situation économique de notre pays. Dans un discours consacré en grande partie aux défis économiques de la transition, il est revenu sur la grave crise économique que nous traversons depuis quelques années et a surtout formulé une série de propositions pour en sortir et renouer avec la croissance et le développement.
Dans son discours, le Chef du gouvernement est revenu sur un constat que font tous les experts et les économistes. Il a mis l’accent sur la faiblesse de la croissance économique même si elle a connu une légère amélioration lors du premier trimestre qui ne s’est pas confirmée lors du second. La faiblesse et la fragilité de la croissance restent un défi majeur pour les pouvoirs publics et sont au cœur des grandes distorsions et des déséquilibres économiques que nous rencontrons depuis quelques années. L’autre grand défi concerne les déséquilibres macroéconomiques de notre pays avec la crise des finances publiques et celle de la balance courante. La crise des finances publiques constitue aujourd’hui un casse-tête majeur pour les pouvoirs publics et laisse planer les plus grandes inquiétudes sur notre économie et la capacité des pouvoirs publics à assurer le respect des engagements de l’Etat. Cette situation est le résultat d’un déficit qui ne cesse de grandir avec une augmentation rapide des dépenses budgétaires et une croissance très modérée des recettes ce qui a été à l’origine de la montée rapide de l’endettement.
Par ailleurs, la balance courante est soumise à de fortes tensions depuis quelques années avec une augmentation rapide des importations et une croissance faible des exportations. Ce déficit a été à l’origine d’une baisse de nos réserves qui ont fondu ces derniers mois et sont descendues sous le seuil de sécurité des 110 jours d’importation. Là également c’est l’arrivée des appuis budgétaires et par conséquent de l’endettement qui nous permettent de maintenir nos réserves légèrement au-dessus des trois mois d’importation.
Le discours a également mis en exergue d’autres défis, notamment la transition économique et la mise en place d’un nouveau modèle de développement. Nous ne cessons depuis des années de mettre l’accent sur la fin du modèle de développement et la nécessité de structurer une nouvelle dynamique de croissance tirée par les nouveaux secteurs qui valorisent la compétence et le savoir de nos jeunes diplômés. Or, en dépit de ce consensus, le nouveau mode de développement tarde à se mettre en place et les responsables successifs de notre politique industrielle n’ont pas jusque-là formulé un grand dessein industriel avec les principaux secteurs qui vont porter notre croissance et qui seront au cœur de ce nouveau modèle de développement.
D’autres défis ont été également soulignés et notamment l’exclusion sociale avec un taux de chômage élevé et la persistance des inégalités régionales.
Il s’agit d’un constat partagé par la plupart des experts économiques et des responsables politiques. Plusieurs suggestions et propositions ont été également formulées pour sortir de cette crise et relancer la croissance et le développement. Le discours du Chef du gouvernement lors du vote de confiance a également formulé une série de propositions renouant avec la croissance. Ces propositions s’articulent autour de trois axes essentiels. Le premier axe concerne la crise des finances publiques et si le Chef du gouvernement a mis l’accent de nouveau sur la gravité de cette situation il a indiqué que la nouvelle loi de finances 2018 comprendra les mesures et les propositions nécessaires pour mettre fin à cette dérive.
Le second axe concerne les réformes économiques à mettre en place afin de relancer la croissance et d’assurer une plus grande efficacité des institutions. Il a mentionné un grand nombre de chantiers de réformes dont l’Administration, la réforme fiscale, la réforme des banques publiques et du système de financement de l’économie, la réforme des caisses sociales et la réforme du système de compensation. Il s’agit de grands chantiers de réformes qui exigent une priorisation pour réunir les chances de succès à ces initiatives.
Le troisième chantier est relatif à la mise en place d’une politique de relance économique afin de renouer avec la croissance. Là également le Chef du gouvernement a indiqué une série de grandes orientations dans la mise en place de ce programme de relance et notamment le rôle du secteur privé et le recours au PPP afin de mettre en œuvre les grands projets d’infrastructures. Même si cette proposition est importante, elle demande des indications concrètes sur le contenu de ce programme de relance et les moyens de le mettre en œuvre.
Le discours programme du Chef du gouvernement a rappelé le constat partagé de blocage de notre processus de transition économique et de la crise majeure des grands équilibres macroéconomiques. Il a développé les grandes lignes d’un programme de sortie de crise, articulé autour de l’arrêt de la dérive des finances publiques, les réformes économiques et un programme de relance économique. Ce programme suscite deux remarques. D’abord, il doit être précisé et ses modalités et ses priorités doivent être indiquées de manière plus concrète. Par ailleurs, ce programme est rempli de bonnes intentions et le nouveau gouvernement sera jugé sur sa capacité à les traduire dans des programmes et à les exécuter pour échapper à ce que nous avons appelé le déficit d’action qui a caractérisé bon nombre de gouvernements post-révolution.
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