Annoncé depuis le début du mois, le discours du président de la République, Béji Caïd Essebsi, prononcé à l’occasion de la Journée nationale de la Femme ce 13 août 2017, a apporté son lot d’annonces. « Qu’elles soient voilées ou non, peu importe, toutes les femmes tunisiennes ont contribué à faire avancer la Tunisie », a déclaré le Chef de l’État sous les applaudissements des personnalités présentes. La plupart étaient des femmes, en cette journée spéciale, représentantes de la société civile.
Absence remarquée d’Ennahdha
Mohamed Ennaceur, président de l’Assemblée des Représentants du Peuple, était présent, en compagnie du Chef du gouvernement Youssef Chahed et de son équipe. En revanche, aucun membre du parti Ennahdha n’était présent, hormis, bien entendu, Zied Laadhari, qui est membre du gouvernement d’union nationale. Rached Ghannouchi, président du parti, s’est aussi distingué par son absence, lui qui est pourtant habitué à prendre part à ce type d’événements. Ça en dit peut-être long sur la position du parti islamiste sur les annonces du président.
Égalité de l’héritage : « une question humaine ! »
Après avoir mis en valeur les avancées de la Tunisie en matière de statut de la femme au fil de l’Histoire, le président de la République est revenu, dans son discours, sur une question qui a fait couler beaucoup d’encre en 2016 : l’égalité de l’héritage entre la femme et l’homme. « Nous trouverons une solution pour concilier religion et principes constitutionnels. La question de l’héritage est humaine. Dieu et son Prophète l’ont laissée aux hommes pour que ces derniers puissent la gérer », déclare Béji Caïd Essebsi, qui ajoute, par la même occasion, qu’une commission spéciale sera créée afin de rédiger un texte de loi adéquat portant sur l’égalité dans l’héritage entre les deux sexes. La commission sera présidée par la députée Bochra Belhaj Hmida et sera composée de 9 membres (Bochra Belhaj Hmida comprise): Abdelmajid Charfi, Slim Loghmani, Slaheddine Jourchi, Saloua Hamrouni, Dorra Bouchoucha, Malek Ghazouani, Ikbal Gharbi et Karim Bouzouita.
Le Chef de l’État souligne, dans cet ordre d’idées, que la femme tunisienne participe à hauteur de 45% dans les dépenses du ménage. « 54% des crédits sont contractés par des femmes, mais seuls 6,6% des investissements sont effectués par elles », dit-il. La raison ? L’octroi du tiers seulement des héritages aux femmes.
Bientôt : une femme pourra épouser un non musulman
Béji Caïd Essebsi insiste, par la suite, sur l’importance de réaliser l’égalité entre les femmes et les hommes aussi bien dans les zones urbaines que dans les campagnes. « Le gouvernement doit se pencher sur ce dossier, et ce afin d’augmenter le revenu minimum des femmes vivant dans la campagne », ajoute-t-il.
Autre question soulevée par le Chef de l’État : le décret numéro 73, relatif à l’interdiction pour les femmes de se marier avec un étranger non musulman. Sur ce sujet, il a rappelé le principe constitutionnel, évoquant la liberté de pensée. « L’État est garant de cette liberté. Il est donc nécessaire d’amender le décret numéro 73 », explique-t-il.
Des annonces qui, même en étant de simples propositions pour faire avancer les choses dans le sens de l’égalité parfaite, n’ont pas manqué de susciter l’ire et les commentaires les plus abominables d’une caste qui voit dans tout ce qui peut améliorer la situation de la femme une atteinte à la religion.