En marge de la 15ème édition du Salon International de l’Investissement Agricole et de la Technologie (SIAT) qui se tient du 30 octobre au 2 novembre 2024 au Palais des Expositions du Kram, une conférence de presse a été organisée aujourd’hui, jeudi 31 octobre 2024, pour présenter « la Stratégie Nationale de Valorisation et de Promotion des Produits du Terroir ». Une stratégie initiée conjointement par le Ministère de l’Agriculture, des ressources hydrauliques et de la pêche et l’Agence de promotion des investissements agricole (APIA). Cette stratégie a été mise en œuvre avec le soutien du Projet d’accès aux marchés de produits agroalimentaires et de terroir PAMPAT (ONUDI/SECO).
Si cette journée peut s’inscrire sous un seul titre, ce serait incontestablement celui de la visibilité des produits locaux. Souvent méconnus et peu valorisés, les produits Tunisiens riches d’une histoire millénaire et d’un savoir-faire ancestral émanant de nos différentes régions vont désormais pouvoir être reconnus, glorifiés et mondialisés grâce à la stratégie précitée qui semble déjà porter ses fruits. C’est globalement dans cet esprit-là, un esprit de fierté tunisienne, que s’est inscrit l’évènement donné aujourd’hui pour l’occasion.
Historique
Lancée depuis 2013, mais ayant connu des passages progressifs cruciaux en 2017 et en 2020, cette première stratégie nationale est officiellement arrivée à terme en mai de 2022 lorsque les intervenants ont misé sur cette stratégie pour promouvoir, à la fois, un nouveau modèle de développement régional qui s’articule sur des produits de terroir, mais aussi pour promouvoir un nouveau modèle de tourisme gastronomique qui positionne la Tunisie en tant que destination touristique gourmande, riche en traditions culinaires et en mets à saveur unique. Et ça n’est pas tout ! L’on a même vu des produits jaillissant de nos terres tunisiennes se transformer subtilement en produits cosmétiques qui n’ont rien à envier aux grandes marques qui se vantent de leurs produits totalement naturels.
Avec la collaboration des différents acteurs dans les régions, multiples activités culturelles et événements touristiques ont été développés dans cette lancée dans certaines régions du pays. Pour ce premier jour d’Exposition se sont les deux régions pilotes Nabeul et Kairouan qui nous ont été présentés à travers leurs spécificités du terroir. Des senteurs florales et épicées ont généreusement émané des stands des exposants. Des lueurs dorées et argentées scintillaient à la réflexion de la lumière sur les productions tunisiennes ayant été médaillés aussi bien en Tunisie mais ayant également décroché et avec brio, des prix d’excellence sur différents Continents.
Un secteur en pleine croissance
Les objectifs centraux de cette stratégie, c’est Mme Lémia Thabet qui les a globalement définis. Inaugurant la conférence, l’experte en accès aux marchés pour le projet PAMPAT, a d’emblée dit que l’objectif central est de « structurer le secteur des produits du terroir en Tunisie ». Le travail n’a pas été effectué de façon arbitraire, loin de là ! « Quelques 220 produits du terroir local ont d’abord été identifiés à travers les 24 gouvernorats du pays, un inventaire pernicieusement détaillé a été établi pour choisir les spécificités tunisiennes à même de représenter un levier pouvant booster le développement économique pour les régions et un choix a par la suite été fait en choisissant deux régions pilotes, en l’occurrence Nabeul et Kairouan« .
C’est ce qu’a fait savoir Mme Thabet avant de préciser que « ces deux régions ont été sélectionnées pour illustrer la dynamique de la stratégie en mettant en valeur trois produits phares. Pour Nabeul, le choix s’est arrêté sur la « harissa », les eaux florales et la figue de barbarie, et pour Kairouan, à côté de la figue de barbarie, l’on a opté pour la promotion de l’huile d’olive et des fleurs ».
Comment on a procédé ? La stratégie s’était articulée sur l’accompagnement des entrepreneurs qui produisent ces produits précités afin qu’ils les promeuvent.
Soutien et accompagnement
L’essence même du projet PAMPAT est d’accompagner les entrepreneurs locaux, chacun dans sa région, afin de leur offrir l’assistance technique requise, la formation nécessaire et l’encadrement personnalisé qui permet à ces petites entreprises d’accéder aux marchés locaux et internationaux. C’est dans ce sens que Mme Hanene Lâabidi Ben Ayed, représentante du ministère de l’Agriculture a souligné que si ce projet est en expansion, c’est parce que sept différent ministères tunisiens se sont attelés ensemble pour que le projet aboutisse, pour que le produit du terroir tunisien prospère et pour que la roue économique se remette en marché. Ce projet a également abouti grâce à notre partenariat avec La Suisse et avec l’ONU. « La majorité des entreprises participantes ayant bénéficié du soutien du programme ont réussi à augmenter de 30% leur chiffre d’affaire, ce qui témoigne de la réussite de la stratégie et de ses programmes. Des emplois dans des régions ont été créés et une nouvelle dynamique s’installe au niveau de l’Intérieur », a-t-elle déclaré. La représentante du ministère de l’Agriculture a révélé qu’à côté des bénéfices économiques et de la création d’emplois, « la stratégie, comme son nom l’indique, a ravivé l’intérêt des consommateurs pour les produits locaux du terroir et de plus en plus de demandes sont enregistrées quant à nos produits tunisiens naturels et bio ».
Pour une destination gourmande
Dans ce même cadre, interrogé par Réalités Online, M. Farouk Ben Salah, expert d’ONUDI pour le projet PAMPAT nous a révélé que le projet s’est PAMPAT s’articule sur plusieurs axes dont la diversification de l’offre, l’innovation, le marketing et l’accès au marché. Il nous a révélé que la stratégie, mise en œuvre par le ministère de l’Agriculture en collaboration avec l’API, l’ONUDI et soutenu financièrement par La Suisse a veillé à depuis 2022 à mettre en exergue les deux projets pilotes à Nabeul et à Kairouan afin de promouvoir les produits du terroir tunisien depuis sa production jusqu’à sa commercialisation aussi bien à l’échelle national qu’international.
« Ce travail consiste dans la mise en place de plusieurs actions dont des show-rooms, des ateliers et des conférences. Nous avons travaillé sur la promotion de la gastronomie via le marketing des produits du terroir en tant que vecteur de développement régional et ce, en mettant en exergue les avantages de ces produits tout en mettant en avant les sites de production. Ceci a donné un nouveau produit touristique aux visiteurs de la Tunisie qui ont été invités à visiter tout le circuit de la production depuis la culture jusqu’à la commercialisation. Il s’agit d’une expérience participative et immersive dans les ateliers de production. On a commencé à leur offrir des coffrets cadeaux du terroir qui jusque-là n’avaient de choix dans les coffrets qu’en choisissant entre un arbre en argent orné d’ambre ou une série de chéchias décorative ! L’approche était de les faire assister à toutes les phases depuis par exemple la récolte des fleurs, leur séchage, l’extraction des huiles, leur mise en bouteille pour arriver à la commercialisation. Les entreprises ont eu droit à tout un programme d’appui pour qu’ils apprennent à leur tour toutes ces étapes pour avoir un produit fini dont l’emballage. Maintenant, le visiteur a le droit à des dégustations, à des essais des produits, ce qui les attire. Mais il faut savoir qu’on ne table pas que sur la gastronomie, l’on a aussi misé sur les produits du terroir qui sont transformés en produits cosmétiques. Dès lors, des séances de massage et de bien-être sont aussi offerts pour promouvoir le produit utilisé. Et pour ce faire, les entrepreneurs ont eu des coachings personnalisés pour faire créer de nouvelles prestations touristiques. Et maintenant que nous avons tablé sur la promotion de l’huile d’olive, de la figue de barbarie et de la fleur du Kairouan ainsi que de la fleur d’oranger de la figue de barbarie et de l’harissa à Nabeul, nous sommes en phase de promotion des dattes et leurs dérivés, la grenade et la tomate séchée notamment à Testour. Nous avons organisé des circuits touristiques dans la zone de production qu’on appelle par exemple Romana-Tour à Testour ! Il s’agit de toute une dynamique qui intègre les différents acteurs, intervenants et producteurs pour faire de la chaine de production une destination gourmande », nous a-t-il confié.
Trozza, le success-Story
Nous sommes devant le stand de production de l’huile d’olive baptisé « Trozza », le packaging est tellement raffiné qu’on aurait par moment cru qu’il s’agirait d’un coffret de parfum. Nous avons rencontré Mme Saoudi qui nous a révélé que l’appellation même est inspirée du nom de montagne à Ouled Hafouz d’où est cultivé l’olive qui fait cette huile.
« Nous avons bénéficié du programme car notre objectif est de promouvoir notre huile et de la faire davantage connaître au-delà des frontières. Trozza raconte une histoire d’oliviers vieille de plus de mille ans et relevant de l’époque romaine. Notre huile est bio et est certifiée depuis l’olive jusqu’à l’emballage tout est bio. D’ailleurs nous avons participé à bien des concours et avons décroché une médaille d’or en des pays de trois continents, en Grande Bretagne, aux Etats Unis, au Canada et au Japon. Nous faisons de l’huile d’olive aromatisée au romarin, au basilic et à la menthe et offrons nos huiles en coffrets aux touristes ce qui promeut la Tunisie et les entreprises tunisiennes. Car nous ne vendons pas notre huile en vrac pour que des étrangers l’utilisent, l’emballent et la vendent, hélas, comme étant une huile étrangère…»
Vendre les odeurs du pays
Bilel Sboui, natif de Kairouan est spécialisé dans le traitements des plantes aromatiques et médicinales cultivées au Kairouan.
« Nous avons créé des confitures mais avons aussi créé des savons, des bougies, des huiles essentielles, des vinaigres, des diffuseurs d’arôme, des écrans solaires, des masques cosmétiques et des extraits de parfum depuis la figue de barbarie et la rose du Kairouan. Nous avons réussi à décrocher une médaille d’or et tous nos produits sont certifiés bio. Nous sommes là pour promouvoir nos produits locaux et promouvoir les richesses de notre région »
La Oueslatiya en bouteille
C’est Sonia Amiri que nous avons rencontrée derrière le stand de l’huile Oueslati. C’est de la région d’Al Oueslateya au Kairouan que les olives sont cultivés et des extractions à froid sont ensuite soigneusement faites.
« Nous avons été choisis parmi les entreprises qui promeuvent le tourisme gourmand. Des touristes ont été invités dans un circuit pour assister à la récolte des olives, à l’extraction et à toute la chaine de production jusqu’à la mise en bouteille et l’emballage. C’était une expérience exceptionnelle qui a promu la gastronomie à base de l’huile d’olive tunisienne».
Mariage d’arômes authentiques
Au Stand Afaouih, on jongle avec les odeurs, les arômes et les senteurs. Absolument aucun additif ni conservateur n’est utilisé, pas même un exhausteur de goût. C’est ce que nous a assuré Souleima.
« Nous faisons des épices, de la confiture, de l’harissa, de la salade mechouia, de la tisane, du café arabe et pleins de produits de conserverie artisanale. Nous faisons aussi sécher la rose et l’ajoutons à des épices agressifs comme le poivre pour l’adoucir. Notre première spécialité est la rose de Kairouan avec laquelle nous avons créé bien des mélanges d’arôme mariant les senteurs de Kairouans aux senteurs de Nabeul ».
Le bien-être emballé
C’est chez Mme Bochra que nous avons exploré les laboratoires Bahia Pharma. C’est là où on fabrique des produits cosmétiques totalement bio et avec des ingrédients entièrement naturels.
« Notre force est celle de valoriser la chaine depuis la plantation jusqu’à la commercialisation. En 2023 nous avons été certifié ISO2200 716. Cela dit nous faisons aussi du miel et de l’huile d’olive des compléments alimentaire en profitant des richesses de la montagne de Oueslat».
Les épices du cap bon à portée
Au stand Pâtes et Sauces, nous avons rencontré Cyrine Belhaj dont l’entreprise est implantée à El Haouaria.
« Qui dit Nabeul et environs, dit gastronomie épicée et savoureuse. Notre projet était de faire des cacahouètes, des noisettes, des amandes, des pistaches des beurres et des pâtes en bouteille. Mais nous faisons aussi du praliné, des ails confis et des tomates séchées farcies. Tout vient des terres de notre gouvernorat que nous voulons promouvoir »
Travail journalistique, rédaction, vidéos et photographies : Abir CHEMLI