Technologies, emplois et compétences dans un monde post COVID-19 !

 

L’éclaircie possible, mais temporaire, en matière sanitaire, nous projette dans la crise économique et sociale (crise du confinement). Elle nous amène à dresser un premier constat des répercussions de l’épisode COVID-19 sur les marchés du travail. En effet, une partie de l’économie mondiale est à genou – économie mondiale qui devrait être en récession aux alentours de 5% en 2020 !

Certes les effets varieront d’un pays à l’autre. Si la Chine s’en tirera avec une croissance positive aux alentours de 3%, d’autres pays pourraient connaître une croissance allant jusqu’à -20% dans les pays émergents ! Dans les pays du G8, c’est la Grande Bretagne qui connaîtra sa pire performance en 300 ans avec -14% ! Cette situation inédite mettra en tension les marchés du travail dans le monde entier. Marchés du travail qui devraient connaître des transformations majeures sous l’impulsion du choc technologique et sanitaire.

Dans cette courte tribune je tenterai de faire le point sur les effets potentiels du COVID-19 sur les marchés du travail et les compétences des travailleurs à la fois à court, moyen et long terme. Pour ce faire, je proposerai de revenir en premier lieu sur l’augmentation du nombre de chômeurs à court terme. Dans un second lieu, je détaillerai l’effet sur la robotisation et la mécanisation à moyen terme qui sera accélérée suite à la crise du confinement. Dans un troisième lieu, je discuterai de la montée en puissance du travail à distance et du E-travail en général. Dans un quatrième lieu, j’attirerai l’attention sur le rôle des grandes entreprises dans la situation sur le marché du travail. Je finirai par revenir sur les nouvelles compétences recherchées dans le contexte de l’après COVID-19.

Une augmentation sans précédent du chômage dans le monde

La propagation rapide de COVID-19 a conduit au confinement des populations et l’arrêt partiel de l’appareil productif. La fermeture temporaire des entreprises a été appliquée dans de nombreux pays à travers le monde, afin de ralentir la propagation de COVID-19. Certains secteurs de l’économie sont touchés de manière spectaculaire et connaissent des pertes dramatiques. Ces pertes peuvent être temporaires ou se poursuivre à long terme, selon la durée et l’impact de la crise sanitaire. La mesure de chômage partiel a été engagée partout dans le monde. Les salariés sont rentrés dans une période angoissante de perte d’emploi suspendue à la durée et à l’ampleur de la crise. D’autres entreprises ont demandé aux travailleurs de travailler à domicile.

Plusieurs secteurs économiques, comme le tourisme, les spectacles et la culture, la restauration, l’industrie, le bâtiment et la construction ont été durement frappés par cette crise. A l’échelle internationale et selon le Bureau International du Travail (BIT), les quatre secteurs dans lesquels les employés ont connu les effets les plus dramatiques sont: l’alimentation et le logement (144 millions de travailleurs), le commerce de détail et le commerce de gros (482 millions); services aux entreprises et administration (157 millions); et la fabrication (463 millions). Le taux de chômage a augmenté de manière spectaculaire dans de nombreux pays. Le taux de chômage au Canada en avril était de 13%, en hausse de 5,2 points de pourcentage par rapport à mars. Le Japon a connu une augmentation du chômage de 2,5% en mars, par rapport au même mois de 2019. Plus de 10 millions de travailleurs du secteur privé en France travaillent comme emplois partiels ou à court terme. En avril, le taux de chômage américain a atteint 14,7% (avec plus de 20 millions de chômeurs en plus en un mois). En Allemagne, le taux de chômage est de 13,2% ayant connu une augmentation de 2,6 millions d’individus en un mois (avril).

Jamais une augmentation aussi importante de chômeurs n’a été constatée de manière concomitante dans le monde. Cette augmentation des chiffres du chômage ne pourrait être considérée comme temporaire que si et seulement si les entreprises retrouvent leurs niveaux de production d’avant crise. Or, il est fort à parier que beaucoup d’entreprises auront du mal à se relever de cet épisode et qu’un chômage fort sera la norme pour au moins les deux années à venir.

Augmentation de la mécanisation et de l’utilisation de l’Intelligence Artificielle dans l’industrie et les services

L’épidémie de COVID19 a changé le monde très rapidement, d’une manière inimaginable. Étant donné que de nombreuses entreprises ont cessé temporairement leurs activités, beaucoup d’entre elles se sont déplacées en ligne. La solution de produire en ligne, de pratiquer du e-commerce, d’automatiser, voire de recourir à l’intelligence artificielle (IA) ont trouvé un écho favorable durant cette période. Comme plus de quatre milliards de personnes ont été mises en quarantaine pendant des semaines ou des mois, l’utilisation de l’industrie et des services de l’IA a considérablement augmenté. Cette tendance s’accentuera dans le futur. Le passage au travail à distance a permis de mieux comprendre l’automatisation, ses avantages, ses restrictions et ses effets psychologiques.

Force est de constater que nombre d’entreprises ont validé leur trajectoire technologique : celle de l’automatisation. Ce tournant a été pris avant le COVID-19 mais a été validé durant le COVID-19. Les caisses automatiques et les drive dans les supermarchés, les ventes en ligne avec des hangars où les robots préparent les commandes…Les avantages de l’utilisation de ces technologies sont spectaculaires pendant la pandémie de COVID-19. Mais, toutes les tâches et tous les travaux ne peuvent pas être entièrement automatisés, car certains d’entre eux nécessitent une profonde réflexion humaine et une prise de décision. Même si ces travaux ne sont pas entièrement automatisés, ils seront en quelque sorte impactés par les technologies. Le recours à la télémédecine a fortement augmenté durant le COVID-19. Ceci pourrait accélérer le remplacement de l’IA par l’homme comme facteur de production. Au cours des prochaines années, la promotion d’un monde automatisé sera inévitable et les entreprises doivent trouver le meilleur moyen de récupérer et d’être plus fortes et plus résilientes dans le monde post COVID-19 en attendant d’autres pandémies.

Le travail à distance et le E-travail comme une nouvelle normalité (New Normal)

De nombreux employés ont été invités à travailler à distance. Même si cela n’était pas prévu, cette situation a permis d’expérimenter une nouvelle façon de travailler. Avant la pandémie, certaines entreprises ont pratiqué cette manière d’organisation du travail(à domicile et à distance), démontrant que c’est une manière de travail réussie. Le travail en ligne est une opportunité de changer substantiellement la façon de travailler et il peut devenir dans un avenir proche une « nouvelle normalité » de travailler. En effet, il y a eu une prise de conscience de l’inutilité de nombreuses réunions, de nombreux déplacements, de nombreuses tâches. De plus, les solutions techniques sont devenues plus élaborées et plus conviviales. Cette période a été une période d’appropriation des outils et d’expérimentation de ces nouvelles pratiques organisationnelles.

Toutefois, il convient de rappeler que ceci ne s’est pas déroulé dans un contexte normal, avec un confinement à la maison, souvent avec d’autres membres de la famille, et sous un stress fort lié au flux d’informations continues sur l’évolution de la situation sanitaire.

L’apprentissage en ligne, la vidéoconférence, les réunions virtuelles, les visites virtuelles seront davantage pratiquées à l’avenir. Le confinement pourrait créer un «appétit» d’intérêt pour les travailleurs et les entreprises à travailler à distance. Cela dépend de leur niveau d’efficacité perçu du travail à domicile. De nombreuses entreprises ont constaté que le travail à distance entraînerait une baisse des coûts et pourraient continuer à pratiquer ce type de travail même après la crise. Compte tenu du changement intervenu au cours des derniers mois, les entreprises devraient repenser leurs stratégies en fonction de méthodes souples et efficaces. Au cours des prochaines années, nous pourrons voir le passage de travail au travail électronique. De nombreuses activités ont évolué en ligne et une partie d’entre elles ne sera peut-être plus de retour. Le travail en ligne continue d’être plus que jamais présent et, à coup sûr, l’investissement dans le travail en ligne changera profondément notre façon de travailler après l’épidémie. Pour cette raison, les entreprises doivent être prêtes à considérer le travail en ligne comme une « nouvelle normalité » de travailler.

L’augmentation du pouvoir de marché des grandes entreprises menace l’emploi

Les avantages potentiels des nouvelles technologies ont augmenté pendant la pandémie du COVID-19. Certaines entreprises qui ont investi davantage dans les technologies se sont renforcées au cours de cette période, gagnant en matière de pouvoir sur le marché. Les grandes entreprises capturent des parts de marché auprès des petites entreprises. A titre d’illustration, après la crise, les plus grandes compagnies aériennes gagneront du pouvoir sur le marché et il sera difficile pour les petites entreprises de survivre. Les géants de la technologie ont été favorisés par le confinement imposé, où l’utilisation du commerce électronique, du travail en ligne, des jeux en ligne et des activités de divertissement continue d’augmenter. Amazon, le géant en ligne a gagné plus de pouvoir sur le marché de la vente au détail de ses produits en ligne. Elle a réduit les frais qu’elle verse aux affiliés et aux éditeurs afin de gagner plus de clients et de les inciter à acheter ses produits. Maintenant, c’est un très grand acteur sur le marché, connu dans le monde entier et n’a pas besoin de continuer à payer pour le marketing. Sa force et sa flexibilité, causeront des dommages aux petits acteurs de ce secteur. Les consommateurs achètent ce qu’ils veulent, où ils veulent et où ils pensent que cela leur convient le mieux. L’augmentation du pouvoir de marché des grandes entreprises aura un impact sur l’emploi des personnes dans les petites entreprises. Après l’épidémie, de nombreuses petites entreprises auront des difficultés à survivre et certaines d’entre elles feront faillite. Beaucoup de gens ont déjà perdu leurs emplois et d’autres emplois seront détruits dans un proche avenir. Du fait de l’augmentation du pouvoir de marché des grandes entreprises, le taux de chômage devrait augmenter.

Un gigantesque besoin de nouvelles compétences

Le confinement a été caractérisé par la nécessité de transformer de nombreuses entreprises de la vente de détail aux institutions d’éducation. Non seulement les entreprises, mais aussi les personnes sont transformées en raison de la situation pandémique. Elles ont été «forcées» d’acquérir de nouvelles compétences pour faire face à la situation. Le COVID-19 a accéléré la transformation numérique et le besoin de nouvelles compétences numériques pour une meilleure préparation au lieu de travail. Tout en gardant une distance sociale, les individus ont pu acquérir de nouvelles compétences en pratiquant l’apprentissage à distance ou en travaillant à distance, ce qui aura un impact sur leur travail post-pandémique. Des technologies telles que l’Internet des objets (IoT), l’IA, les robots, les méga-données, la réalité augmentée et la réalité virtuelle prendront place dans les entreprises afin de les rendre plus résilientes.

Dans un monde post COVID-19, il est nécessaire d’acquérir les compétences nécessaires pour pouvoir travailler efficacement avec ces technologies. Pendant une pandémie, les entreprises ont montré leur potentiel de créativité, d’innovation et de pensée critique en trouvant de nouvelles façons de travailler et de fournir leurs services. La créativité, l’innovation et la pensée critique seront des compétences essentielles dans un monde post-COVID-19. Après la pandémie de COVID-19, la plupart des compétences essentielles d’aujourd’hui changeront, de sorte que les entreprises doivent former leurs employés avec les compétences futures requises, afin de rester efficaces. La manière de faire face à la nouvelle réalité d’un monde post COVID-19 est de s’engager dans une mise à jour continue des compétences requises par le marché.

Pour conclure

Les emplois et les compétences nécessaires au travail ont été transformés depuis le début de l’épidémie de COVID-19 et ils ne seront plus les mêmes dans un monde post-pandémique. La distanciation sociale, la fermeture temporaire d’entreprises, la perte d’emplois et l’effondrement de nombreuses activités ont eu un effet dévastateur dans le monde entier. Le futur proche verra un monde automatisé, où l’IA et d’autres technologies pourront effectuer des tâches précédemment réalisés par les humains. Le COVID-19 a accéléré la transformation numérique de nombreuses entreprises, apportant ainsi un énorme besoin de nouvelles compétences. Le travail à distance a été pratiqué pendant cette période et pourrait dans un proche avenir être considéré comme une nouvelle normalité au travail. Les grands acteurs gagneront du pouvoir sur le marché, tandis que les petites entreprises seront menacées de faillite. Malheureusement, dans ce contexte où l’Etat a un rôle fondamental à jouer, ses marges de manœuvre se sont rétrécies sous l’effet d’un endettement record !

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