Après sa reprise notable observée en 2018, le secteur du textile et de l’habillement a poursuivi son élan en 2018, et pour 2019, les « textiliens » envisagent de continuer sur le même rythme. Mais comment y arriver ? C’est autour de cette question qu’une rencontre a été organisée par la Fédération Tunisienne du Textile et de l’Habillement (FTTH) mardi 18 décembre 2018 au siège du Centre de Promotion des Exportations de la Tunisie (CEPEX).
Placée sous le thème de la relance du secteur du textile et de l’habillement, la rencontre était l’occasion de réunir les membres du bureau exécutif de la FTTH, les responsables régionaux de l’organisation et les professionnels du secteur. Au centre des débats : les difficultés du secteur, le rôle des pouvoirs publics pour l’appuyer et les actions à entamer dès 2019 pour soutenir le développement de cette industrie.
La conférence, soulignons-le, a été marquée par la présence de Hosni Boufaden, président de la FTTH, de Samir Rekik, représentant du ministère de l’Industrie, ou encore de Sami Zaoui, représentant du du Conseil des Analyses économiques.
Un secteur clé dans le tissu industriel
L’industrie du textile et de l’habillement emploie 150 000 personnes. Avec 1609 entreprises recensées en 2017, il représente 31% du tissu industriel. D’après le représentant du ministère de l’Industrie et des PME, Samir Rekik, on a assisté à un regain de confiance dans le secteur en 2017, comme en témoigne les chiffres de l’exportation : 20% des exportations des industries manufacturières, pour une enveloppe totale de 6 280 millions de dinars en 2017 et de 6 683 millions de dinars jusqu’en novembre 2018.
L’État, poursuit Samir Rekik, s’est engagé à soutenir le secteur depuis la tenue du conseil ministériel restreint (CMR) de juin 2017, à travers l’amélioration de la compétitivité, l’accélération des investissements (notamment les IDE) et la promotion de la Tunisie en tant que hub industriel et technologique. « Nous sommes convaincus que le secteur est capable de conquérir une position à l’échelle internationale. Il faut donc soutenir sa compétitivité », a-t-il encore déclaré.
Fiscalité, gouvernance, législation : les conditions d’un plan de relance réussi
Qu’en est-il du plan de relance ? D’après le membre du Conseil des analyses économiques, Sami Zaoui, il comporte deux dimensions à moyen et à court terme. Il s’agit de relancer un secteur dans une conjoncture marquée par des difficultés non négligeables, à l’instar de la fragilité politique, la baisse des investissements, l’importation non maîtrisée et la suppression des incitations destinées au secteur. Résultat, selon Sami Zaoui : le développement de l’économie parallèle.
Le plan de relance élaborée par le Conseil d’Analyse économique, soulignons-le, concerne plusieurs secteurs d’activité, dont le textile. A ce niveau, il vise à préserver les entreprises, à maîtriser les équilibres financiers macro-économiques (balance commerciale, endettement) et à préserver la paix sociale.
Le renforcement des incitations fiscales et financières s’impose également selon Sami Zaoui, qui a suggéré la mise en place d’un moratoire fiscal de 3 ans. Une telle mesure permettra d’assurer une stabilité fiscale, étant donné qu’aucune taxe supplémentaire ne sera imposée durant cette période. Il faut également envisager, selon le représentant du Conseil, à aligner le taux d’imposition sur les sociétés, qu’elles soient offshore ou onshore, à hauteur de 10%. « Nous devons mettre en place une maison de l’entrepreneur dans chaque région, au même titre qu’un système de micro-finances supervisé par la Banque Centrale de Tunisie (BCT) », a ajouté l’expert, qui a aussi souligné la nécessité de réviser la législation des changes afin de rétablir la confiance en le dinar.
Par ailleurs, la mise en place du plan de relance de l’industrie du textile et de l’habillement requiert la satisfaction de plusieurs conditions. Tout d’abord, il s’agit d’améliorer l’attractivité du secteur, mais aussi de la compétence de la main d’oeuvre. De fait, il est devenu difficile de trouver une main d’oeuvre bien formée selon Sami Zaoui. En parallèle, un contrôle doit être instauré au niveau des friperies. « Une paix sociale est requise, au même titre que le rétablissement de l’autorité de l’État qui a été mise à mal depuis 2011. Nous devons également instaurer une gouvernance efficace du secteur. De ce fait, un comité de gouvernance du programme de relance doit être constitué et rattaché à la présidence du gouvernement. D’un autre côté, le volet communicationnel doit être axé sur des rencontres BtoB, avec les partenaires sociaux, les administrations, le grand public et les médias », a-t-il déclaré.
Relance : les 6 propositions de la FTTH
Pour sa part, le président de la FTTH, Hosni Boufaden, a indiqué que le plan de relance de l’industrie du textile doit reposer sur plusieurs axes proposés par la Fédération. Il y a, tout d’abord, la mise en place d’un nouveau modèle de gouvernance dans le cadre d’un partenariat public-privé (PPP). À travers cette proposition, la FTTH invite à la mise en place d’un conseil national stratégique pour la gestion du secteur. Elle comprend la simplification des procédures et des démarches administratives, et également la création d’un fonds de soutien au secteur de 50 MDT.
La seconde proposition de la Fédération porte sur l’intégration dans le secteur à travers le lancement de projets stratégiques. Le président de la FTTH a aussi évoqué la nécessité de la promotion du secteur dans les marchés traditionnels et nouveaux (États-Unis). Dans ce contexte, la diplomatie économique doit être de mise. De leur côté, les industriels sont appelés à mettre en place un plan « Go to Market » pour viser de nouveaux marchés. Ensuite, Hosni Boufaden a mis l’accent sur l’importance d’une formation adéquate capable de satisfaire les besoins du marché. Elle est élaborée par l’État et les professionnels du secteur, considérant que ces derniers sont les mieux placés pour connaître les besoins du marché du travail et, de ce fait, proposer la formation adéquate.
D’autre part, la relance doit se faire à travers des mesures incitatives adaptées aux attentes du secteur, à l’instar de la mise en place d’une tarification énergétique préférentielle pour le secteur. Les importations, dans ce même cadre, doivent être rationalisées. « Nous n’avons jamais appelé à interdire l’importation, mais plutôt à la rationaliser », a-t-il martelé. Enfin, la FTTH propose, selon son président, la mise en place d’une offre territoriale améliorée et une logistique performante. Celle-ci permettra de créer des infrastructures de qualité (zones industrielles, parc de production d’énergie). Il s’agit également de rendre les opérations d’exportation du textile prioritaire dans le port de Radès selon le président de la FTTH.
La FTTH, à travers le plan de relance, affiche des objectifs ambitieux visant à soutenir la reprise qui a été observée en 2017. Outre l’appui de l’État, l’industrie du textile et de l’habillement bénéficie également de celui du CEPEX. Le rôle du centre consiste principalement à assurer la visibilité du secteur tunisien à l’étranger à travers l’organisation de salons et de rencontre BtoB.
M.F.K