Les Tunisiens résidents à l’étranger devraient constituer une composante puissante de notre stratégie de développement compte tenu de leur poids démographique : 1,3 million d’habitants soit 11% de la population, mais aussi d’autres considérations à la fois qualitatives et quantitatives, outre leur caractère électoraliste exploité par les uns ou par les autres.
En effet, il y a le volume des transferts en devises vers le pays natal, un vecteur d’équilibre pour la balance des paiements qui a tendance à stagner ces dernières années avec la crise économique en Europe. Mais surtout la modification structurelle et qualitative de notre colonie à l’étranger, constituée de plus en plus de cadres supérieurs, (médecins, ingénieurs), professions libérales, chercheurs, universitaires, chefs d’entreprises qui peuvent et doivent, peu ou prou, donner un coup de pouce à leur pays natal en difficulté. Alors que ce même pays a fait beaucoup pour leur éducation, leurs études, leurs formations.
Faut-il rappeler que le pouvoir d’achat, donc la capacité d’épargne et d’investissement des TRE est dix fois celle des Tunisiens résidents dans notre le pays ? !
La contribution des TRE au développement du pays est une problématique complexe qui a souvent été posée mais n’a jamais fait l’objet d’une unanimité ou d’un consensus.
Or. nos gouvernants depuis un demi-siècle, n’ont jamais eu une stratégie migratoire volontariste et performante pour faire des TRE un facteur de développement majeur, bien orienté, aussi bien en faveur du rapprochement de notre colonie à l’étranger vis-à-vis de la mère patrie, qu’en faveur de l’optimisation de la croissance économique du pays.
Les divers gouvernants qui se sont succédé à la tête du pays se sont contentés d’accorder quelques avantages matériels au compte-gouttes, pour répondre à une partie des revendications des TRE, en contrepartie de leurs votes : tarifs de transport soldés, exonérations douanières, “du bricolage à la petite semaine”, alors que les associations de TRE aspirent à devenir des partenaires à part entière du développement du pays et non des revendicateurs et des chercheurs de subsides !
La stratégie de gestion des TRE devrait être une politique intégrée et multiforme au service du développement du pays, tout en favorisant les intérêts de nos ressortissants à l’étranger. Nous supposons que les intentions sont loyales et favorables de part et d’autre.
Chaque TRE peut et doit mener une action fertile en faveur de son pays natal, en fonction de sa bourse, de ses compétences, de son savoir-faire et de ses relations.
Quelques exemples sautent aux yeux : épargner en dinars ou en dinars convertibles en Tunisie, investir dans un projet économique créateur de richesses et d’emplois durables, favoriser des activités exportatrices de biens et services à partir de la Tunisie, inciter des investisseurs étrangers à implanter des projets dans la mère patrie, s’impliquer dans des actions de transfert de technologie ou mener des projets de recherche…
Outre la stratégie à élaborer qui manque d’imagination et de cohésion, il y a un déficit flagrant d’instruments et de mécanismes de réalisation avec, ce qui est pire, une dispersion des intervenants, ministère des Affaires sociales, Office des tunisiens de l’étranger, Direction générale des Douanes, APII, Consulats. La réglementation relative aux opérations avec l’étranger a besoin d’être assouplie et adaptée aux réalités socio-économiques du pays, c’est un non-sens que d’essayer de faire payer des droits de douane sur des ambulances médicalisées neuves, envoyées par des associations caritatives européennes, à titre de dons aux associations ou aux hôpitaux tunisiens ? Le même problème se poserait pour des motopompes neuves destinées à équiper des puits pour l’irrigation des cultures dans les zones défavorisées et soumises à de multiples autorisations et paperasses ? !
Le texte de loi relatif à la création du Conseil supérieur de l’émigration, même s’il est seulement consultatif et non décisionnaire a mis plus de cinq ans avant d’être adopté, mais les décrets d’application tardent à émerger du magma administratif. C’est quand même un pas vers l’âge de la maturité.
Nous devons sortir de la logique revendicative et basique en matière d’émigration pour adopter une démarche volontariste et participative.
“Ne pas exiger ce que votre pays doit faire pour vous, mais s’impliquer dans ce que nous pouvons faire pour notre pays”.