Chaque gouvernement a sa propre stratégie en matière de réforme du système bancaire, comme les gouvernements se succèdent à un rythme infernal qui ressemble à s’y méprendre avec une instabilité politique préjudiciable à toute tentative de croissance économique, les décisions les plus contradictoires sont prises, elles aboutissent à des non-sens et à des contre-performances.
C’est le règne de l’improvisation, ce qui ouvre une autoroute devant les diktats des institutions internationales qui ne jurent que par la libéralisation à outrance de l’économie et la privatisation sauvage. La BCT est là pour assister impuissante aux décisions des ministres des Finances alors qu’elle devrait avoir une opinion à défendre.
Est-il logique et soutenable de vendre des banques publiques 18 à 24 mois après les avoir recapitalisées, avec des injections massives d’argent public frais et avant même que les processus de mise à niveau engagés ne soient menés à terme pour produire leur impact positif sur le bilan de ces banques ? Ce serait offrir un joli cadeau sur un plateau d’argent à de prétendus partenaires stratégiques !
Au fait, quelles sont les puissantes banques étrangères susceptibles d’investir massivement dans des banques publiques tunisiennes aux portefeuilles lourdement chargés de créances douteuses ou bien alors à des conditions privilégiées par exemple “délester ces banques des créances calcinées et celles relevant des entreprises publiques” plus ou moins garanties par l’Etat. Mais alors qui viendrait dorénavant au secours des institutions et entreprises publiques qui assument des missions dévolues à l’Etat comme la TRANSTU, la SNCFT, la STEG, la Sonède, l’Office du commerce, l’Office de l’huile, l’Office des céréales, TUNISAIR, la CTN, El Fouladh, la Cellulose,… ?
En effet, l’Etat défaillant dans ses multiples fonctions de service public auxquelles s’ajoutent celles de la promotion de la croissance économique et du développement régional, se décharge de ses missions sur plusieurs institutions, il doit donc les soutenir. Cela ressemblerait à une opération d’improvisation doublée d’un bradage : la vente des “bijoux de famille”, une fois la vente conclue, l’Etat ne trouvera plus de banques sur lesquelles il pourrait compter ou auxquelles il pourrait donner des instructions pour financer la campagne de collecte, commercialisation et/ou d’exportation de l’huile d’olive ou encore celle de la collecte et de l’importation des céréales nécessaires à l’alimentation de la population ?
Cela est aussi valable pour les importations de sucre, de café, de carburant pour la SNDP et de gaz pour la STEG.
Alors que la priorité, autrement plus lucrative et aisée, serait de céder, à travers la Bourse et successivement pour ne pas inonder le marché financier et faire baisser les prix, les participations minoritaires de l’Etat dans les six différentes petites banques privées !
La vente d’une grande partie des participations publiques majoritaires dans deux ou trois grandes banques serait une erreur stratégique et une catastrophe pour le processus de développement dans notre pays de façon directe et indirecte.
L’Etat a, certes, besoin de ressources financières pour combler, un tant soit peu, le déficit béant et croissant de son budget mais il y a d’autres biens disponibles à céder par exemple la vente des entreprises confisquées qui traine depuis des années, alors que leur valeur ne cesse de régresser, la mauvaise gestion aidant.
Il y a de larges franges de la société, parmi les plus fortunées et ceux qui gagnent le plus d’argent dont les professions libérales, qui ne paient pas ou si peu d’impôts alors qu’elles bénéficient des services publics et de la compensation des prix des denrées de base.
Ne parlons pas des contrebandiers qui encaissent des sommes folles, de façon illégale, sans bourse déliée au profit du fisc et sans être inquiétés.
Si la BH était privatisée, qui financera la politique de logement social de l’Etat ?
Si la BNA était privatisée qui pourrait assurer la promotion du développement de l’agriculture et de financement du crédit agricole ?
Pour la STB c’est le problème du financement de l’industrie de l’hôtellerie et du tourisme qui se pose, avec moins d’acuité vu qu’il s’agit de résoudre la question de l’assainissement de l’endettement des hôtels.
Les déclarations des uns et des autres relatives à la privatisation des banques publiques pourrait provoquer des “délits d’initiés”.
A qui incomberait la responsabilité alors ?
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