Le déficit courant de la balance commerciale s’est amplifié au cours du premier trimestre 2014 pour atteindre 4,6% du PIB durant les cinq premiers mois alors qu’il n’était que de 3,9% en 2013.
Il s’agit d’un élargissement sans précéder du déficit de la balance commerciale à cause d’une augmentation sensible des importations portant surtout sur les produits énergétiques et les produits alimentaires.
Ils représentent à eux seuls 43% du total. Le déficit a atteint ainsi 3.290 MD, tandis que les exportations ont baissé de 1,8% au premier trimestre 2014 à cause de la crise financière dans l’Union européenne. Il faut dire également que faute d’une récolte fabuleuse de l’huile d’olive, les exportations d’huile d’olive se sont effondrées, ce qui fait que les produits agroalimentaires exportés n’ont réalisé que 72 MD de recettes contre 328 MD en 2013. Par ailleurs, les exportations de phosphate et dérivés ont régressé de 1,4%.
Il faut dire que la liberté des importations a engendré des abus, ce qui fait que nous importons des produits inutiles, de luxe ou de fantaisie qui concurrent parfois les produits tunisiens et grèvent la balance commerciale, ils sont payés en devises alors que nos réserves en devises baissent dangereusement.
Reprise des tensions inflationnistes
Après une accalmie tout à fait relative et de courte durée durant les mois de mars et avril avec un taux d’inflation de 5% et 5,2%, la spirale inflationniste a repris de plus belle avec 5,4% en mai 2014. Durant le mois de juillet, le chiffre n’a pas été encore publié, il serait de l’ordre de 7%.
Il faut dire qu’avec l’approche du Ramadan la tradition ne s’est pas démentie pour ce qui est de la flambée des prix des produits agroalimentaires frais, mais le phénomène s’étend à tous les segments du marché.
Il y a lieu de remarquer que depuis l’avènement de la Révolution, la fraude sur les prix par les commerçants de fruits et légumes, sans oublier les bouchers et les poissonniers, a décuplé, et ce malgré les contrôles et les procès-verbaux d’infractions constatées par les brigades d’inspecteurs du contrôle économique.
Il faut dire que les consommateurs sont tantôt complices tantôt tolérants et que les sanctions sont souvent légères ce qui n’est pas dissuasif, d’où la nécessité d’être plus sévère à l’avenir pour être un tant soit peu efficace.
Les difficultés du budget de l’État
Début août nous sommes encore en train de négocier la loi de Finances complémentaire relative à l’exercice 2014 alors que logiquement les travaux préparatoires du Budget 2015 devraient battre leur plein.
Il semble cependant qu’après des tergiversations qui ont duré plus de trois semaines, l’ANC et le gouvernement soient sur le point de se mettre d’accord sur un compromis.
Celui-ci achoppe seulement sur deux points essentiels : faut-il lever le secret bancaire sur les cas litigieux pour traquer la fraude fiscale ou bien continuer à couvrir les fraudeurs et quelle forme doit revêtir la recapitalisation urgente des trois banques publiques ?
Seule consolation, le déficit du budget ou plutôt les ressources non identifiées du budget qui étaient au mois de mars de 12 milliards de dinars. Or après identification de nouvelles ressources au deuxième trimestre 2014, d’un montant de 7,480 MD, il ne reste plus qu’à trouver 4,520 MD. Une bricole, dites-vous ? Le problème est qu’on emprunte pour «boucher les trous des dépenses de fonctionnement» (salaires des fonctionnaires et frais divers) non pour investir, développer le pays et créer des emplois.
Baisse sensible de la productivité et de la compétitivité
Durant le mois de Ramadan, qui a coïncidé cette année avec le mois de juillet suivi par le mois traditionnel des congés, août, la productivité du travail aussi bien dans le secteur privé que dans l’Administration avec augmentation sensible de l’absentéisme et baisse vertigineuse de la ponctualité.
Il s’en suit une régression notable de la compétitivité des entreprises économiques et par voie de conséquence celle des produits exportables tunisiens sur les marchés extérieurs. C’est ainsi que les douze jours de congé du mois de juillet 2014 sont une catastrophe pour la croissance qui coûte 0,2% du PIB par jour.
Par contre il est aisé de constater que la consommation des Tunisiens va bon train, notamment pour ce qui est des produits alimentaires, des loisirs, des vacances et du tourisme. Il faut croire que le développement des dépenses, malgré l’augmentation vertigineuse des prix, se fait aux dépens de tout ce qui est épargne et investissement.
Faut-il rappeler que les dépôts de la clientèle dans les banques stagnent ou baissent tandis que l’endettement des ménages progresse : on emprunte pour consommer et non pour investir et développer le pays ; État et ménages, même comportement. La contrebande fait fureur dans le pays grâce à la perméabilité de nos frontières et à la passivité des pouvoirs publics, ce qui justifie la vente clandestine de coffres-forts au grand jour et impunément le long des routes : il faut bien mettre à l’abri la quantité incroyable de cash qui circule hors des circuits bancaires.
Ridha Lahmar