En raison de l’impact croissant du changement climatique, notamment des vagues de chaleur extrême, la Tunisie a connu une augmentation des températures au cours des décennies passées, affectant et continuant d’affecter la vie humaine en général. L’été 2024 bâterait de nouveaux records de température, ce qui affectera la majorité des pays, notamment la Tunisie, parmi les plus exposés au changement climatique en Méditerranée.
Dans ce contexte, l’Institut arabe des chefs d’entreprises (IACE) a organisé, dans le cadre du programme ’90 minutes avec L’IACE’, un débat intitulé ‘Préparations de la Tunisie face à la vague de chaleur’, en présence du Colonel Abdelaziz Hermassi, directeur des études et de la gestion des crises à la Protection Civile, Jomaa Souissi, directeur central chargé de la stratégie et de la planification à la Société tunisienne de l’électricité et du gaz (STEG), et Moncef Dridi, directeur de l’exploitation au Grand Tunis à la Société Nationale d’Exploitation et de Distribution des Eaux (SONEDE).
Coupures d’électricité en vue ?
Jomaa Souissi, directeur central chargé de la stratégie et de la planification à la STEG, prévoit une consommation atteignant environ 5200 mégawatts cet été, dont environ 4600 mégawatts fournis par la société à travers ses centrales, tandis que près de 700 mégawatts seront importés d’Algérie.
Il a également noté que les hausses de température et les incendies perturbent plusieurs lignes, y compris celle reliant la Tunisie à l’Algérie. Les pannes résultant de ces incidents pourraient contraindre la société à des coupures d’électricité, mais aucune programmation de coupures n’est envisagée pour les citoyens ou les institutions.
Qu’en est-il de la distribution d’eau potable?
Mounir Dridi , directeur de l’exploitation au Grand Tunis à la SONEDE, a évoqué plusieurs problèmes rencontrés par la société, notamment liés aux pompes et à la diminution du niveau des eaux souterraines, poussant la société à chercher des sources plus profondes pour maintenir le débit.
Il a affirmé que la SONEDE n’a pas l’intention de procéder à des coupures d’eau, ni de revenir à la politique d’approvisionnement par intermittence adoptée l’année précédente. Tout manque d’eau potable serait soit dû à des interruptions soudaines liées à des travaux de certains entrepreneurs, à des accidents imprévus ou à des programmes de maintenance préalablement planifiés, avec une notification préalable aux résidents.
Pour ce qui est de la question de l’approvisionnement en eau dans le nord-ouest, en particulier dans les gouvernorats de Kef et Siliana, elle est liée à la rareté des pluies ces dernières années et à l’épuisement des nappes phréatiques. Des programmes sont en cours pour forer davantage de puits dans la région afin de surmonter ces problèmes.
Chiffres sur l’impact des vagues de chaleur sur les interventions de la Protection Civile
Le Colonel Abdelaziz Hermassi, directeur des études et de la gestion des crises à la Protection Civile, a déclaré que les changements climatiques et l’augmentation des températures ont prolongé la saison estivale à environ 9 mois. Les opérations de lutte contre les incendies, autrefois concentrées à certaines périodes de l’année, sont désormais nécessaires tout au long de l’année.
Il a fourni des chiffres pour la période allant du 1er mai au 25 juin 2024, où les services de la Protection Civile sont intervenus dans 190 incendies, entraînant la destruction de 478 hectares. Comparativement, l’année précédente, il y avait eu environ 43 interventions pour 66 hectares brûlés au cours de la même période.
En ce qui concerne les forêts, 4 incendies ont été enregistrés par la Protection Civile à la même période en 2023, entraînant la destruction d’environ 3 hectares. Cette année, il y a déjà eu 18 incendies avec près de 18 hectares brûlés jusqu’à présent. Quant aux cultures et aux herbes sèches, il y a eu 457 incendies entraînant la destruction d’environ 400 hectares, comparativement à environ 46 incendies et 21 hectares brûlés l’année précédente. La Protection Civile a également enregistré environ 26 décès sur les plages du pays et plus de 8 dans des canaux d’irrigation depuis le début de l’été.
Les heures de pointe ont changé
En plus de la hausse de la consommation (environ 3000 mégawatts juste pour les climatiseurs), les comportements des consommateurs tunisiens ont également changé au cours des dernières années, affectant les heures de pointe. Avant 2021, les heures de pointe étaient entre 11h et 13h, mais elles sont maintenant entre 15h et 16h, en raison du retour des employés à la maison et de l’activation de plus de climatiseurs.
L’année 2015 comme référence
Jomaa Souissi, directeur central chargé de la stratégie et de la planification à la STEG, a déclaré que l’augmentation des températures est devenue inévitable depuis le début de 2015, lorsque la société a enregistré un pic de consommation et une augmentation des températures qui ne sont jamais retournées à leurs niveaux normaux. Ainsi, l’année 2015 est devenue une référence pour la STEG.
Dessalement de l’eau de mer, une solution ?
Mounir Dridi, directeur de l’exploitation au Grand Tunis à la SONEDE, a rappelé la baisse du taux de remplissage des barrages ces dernières années par rapport aux années précédentes, attribuée à des conditions météorologiques plus chaudes. Il a également mentionné les grands projets de dessalement d’eau, en cours de réalisation, comme la station de dessalement de Zarzis dans le gouvernorat de Gabès, opérationnelle depuis mi-juin, améliorant ainsi l’approvisionnement en eau dans le sud-est (à Tataouine, Médenine et Gabès).
En plus de la station de dessalement de l’eau de mer à Sfax, qui commencera ses opérations début juillet prochain, cela améliorera positivement l’approvisionnement sur la côte (Monastir, Mahdia et Sousse), ces villes côtières étant liées au même réseau d’approvisionnement en eau (via l’eau du Nord). Il a également annoncé que la SONEDE continuera de promouvoir l’économie d’eau, visant une consommation individuelle d’environ 100 litres par jour (actuellement autour de 124 litres par jour), tout en poursuivant les programmes de dessalement de l’eau. En plus des trois stations mentionnées, il a mentionné une autre station programmée à Mahdia, dont les études préliminaires ont commencé, ainsi qu’une station à Zarzis.