Les dernières déclarations de l’ex-président provisoire de la République, Mohamed Moncef Marzouki à l’émission d’Ali Al Dhufair sur la chaîne Al Jazeera, ont provoqué un véritable tollé faisant, du coup, les choux gras des sites électroniques, friands de ce genre d’informations.
Où réside le couac ? Il faut dire que Moncef Marzouki, lié par une relation passionnelle avec la chaîne Al Jazeera, se plie souvent de bonne grâce à toutes les questions qu’on lui pose ou qu’on souffle à leurs présentateurs. Quand il se confesse devant les caméras de cette chaîne, il a du mal à se retenir ou, plutôt, il trouve un malin plaisir de chercher des noises à la Tunisie, à son peuple et à ses concurrents politiques. Il semble que sa défaite lors des dernières élections présidentielles lui est restée en travers de la gorge, lui qui a dû difficilement se résigner à l’évidence et sortir bredouille du palais de Carthage. Un naufrage politique qui emporta son parti le CPR, l’a conduit à créer le mouvement Tunisie volonté et l’amena à de douloureuses remises en cause dans ses alliances, notamment avec Ennhadha qu’il accuse de plus en plus de parti islamiste en déphasage avec l’histoire.
Faut-il s’étonner de ses critiques acides envers la société tunisienne, qu’il la considère comme affectée par la corruption, le népotisme, le vol, le mensonge et l’hypocrisie ? En suivant son itinéraire depuis son accession à la présidence de la République jusqu’à ce jour, l’on peut dire que chaque fois que Moncef Marzouki parle aux médias notamment lorsqu’il est à l’étranger, il a toujours véhiculé la même image de la Tunisie et des Tunisiens. Une image écornée, celle d’un pays qui va à vau- l’eau, de Tunisiens opprimés et pourtant nostalgiques de la dictature et d’une révolution qui se poursuivra et attend son nouveau messie.
Faut-il oublier sa dernière tribune publiée le 23 janvier dernier, sur les colonnes du Monde, dont l’entame donne le tournis. Il suffit de lire ce qui suit pour s’en apercevoir: «Quel est le point commun entre l’attentat du 11 septembre 2001 aux États-Unis, celui de Berlin le 19 décembre 2016, et celui de Nice le 14 juillet 2016? La haine des Occidentaux! Pas seulement. Ils ont été commis par mes compatriotes, par des Tunisiens qui ont frappé aussi en Tunisie»
Un ex-président ne dit jamais ça ! A défaut d’être un rassembleur lors des trois années lorsqu’il a présidé aux destinées de la Tunisie, tenir aujourd’hui ce genre de discours n’augmentera jamais sa popularité, ni même ses chances de monter au créneau lors des prochaines échéances électorales. La colère qu’il nourrit contre ses concurrents politiques, toutes tendances confondues et le peu de respect qu’il voue aux Tunisiens, peuvent-ils être de bons arguments d’une campagne politique, d’une figure connue pour son militantisme et son long combat pour les libertés ?
Un ex-président ne dit jamais ça ! Un démocrate, un vrai, doit toujours accepter les règles de l’alternance pacifique au pouvoir, participer à renforcer la construction démocratique en s’abstenant à ressusciter,à tous les instants, les sentiments tribalistes, jouer pleinement son rôle d’opposant en enrichissant le débat public, non en se délectant à critiquer son pays et son peuple dans un média dont la crédibilité et l’indépendance ne sont pas avérées.
Grâce à ses déclarations, Moncef Marzouki a réussi, quand même, à créer un non-événement. Il a pu susciter une polémique stérile et des surenchères improductives, mais jamais un débat qui interpelle les Tunisiens ou qui se focalise sur des questions qui les préoccupent.
Grâce à ses déclarations, Moncef Marzouki, ne fait qu’approfondir le clivage entre lui et les autres formations politiques. Il lui sera désormais impossible de bénéficier du soutien d’ Ennahdha, qu’il qualifie de parti islamiste en dehors de l’histoire, ou de recueillir la sympathie de la gauche tunisienne qui, à ses dires se situe en dehors de la géographie,
Grâce à ses déclarations, Moncef Marzouki trouvera de moins en moins de sympathisants parmi une population de corrompus, de voleurs et d’hypocrites.
Enfin, malgré ses déclarations, la révolution se poursuivra certes, mais elle finira par balayer de son chemin ceux qui ne sont prêts qu’à discourir, sans jamais agir dans le sens de l’histoire.
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