Les principes de neutralité et d’indépendance dans les médias et la nécessité de mettre en place des institutions de télévision de «service public» ont été placés au cœur des débats, notamment après le 14 janvier. À l’occasion de la commémoration de son 47e anniversaire, le 30 mai, la Télévision tunisienne a organisé une conférence internationale autour du thème : «la télévision de service public : quelles garanties pour l’indépendance et la neutralité ?». Mise au point.
Si la Tunisie vit une transition démocratique, la télévision tunisienne, doit, elle aussi, faire sa révolution et passer d’un état de média gouvernemental à celui de média de service public. Car liberté implique responsabilité.
HAICA : beaucoup d’espoirs
«La HAICA, dont nous avons longtemps attendu la création, nous aidera aujourd’hui à transformer notre télévision en un réel média de service public.
Depuis le 14 janvier, la télévision tunisienne a essayé de remplir ses fonctions et de répondre aux attentes du public selon les normes professionnelles établies dans les régimes démocratiques, après avoir été une source de propagande pour le régime déchu», a affirmé Imen Bahroun, Présidente directrice générale de la Télévision nationale tunisienne.
Elle a annoncé que «les prochains projets de la télévision s’articulent autour de l’élaboration de son statut et de son organigramme. D’ailleurs nous sommes en train de travailler sur la définition de la ligne éditoriale. Un projet que nous avons déjà commencé avec des experts nationaux et internationaux. Ce sont les trois axes sur lesquels nous accentuons nos efforts, depuis bien longtemps déjà, afin de les réaliser dans cette phase que nous jugeons très importante pour la télévision tunisienne.»
La HAICA, créée le 3 mai 2013, aura pour mission de fixer des normes visant à réglementer le paysage audiovisuel. Elle aura également pour objectif de veiller à la neutralité et à l’indépendance des institutions médiatiques.
Le chef du gouvernement, Ali Laarayedh, a déclaré dans ce sens que les autorités n’épargneraient aucun effort pour faciliter le travail à ladite autorité, invitant toutes les parties à ne pas instrumentaliser les acquis de la Révolution.
Neutre et indépendante
Pour que la télévision soit neutre et indépendante, elle doit d’abord bénéficier d’un contexte juridique «sain». «Son indépendance doit être réglementée d’un point de vue juridique. Il faut clarifier les rapports entre les autorités et les dirigeants de la télévision nationale, selon les standards internationaux», a expliqué Benoit Moulin, représentant de l’UNESCO. «Une télévision de service public ne doit surtout pas dépendre du gouvernement. La composition de son Conseil d’administration doit être pluraliste» a-t-il ajouté.
Le respect de la déontologie est essentiel pour le bon fonctionnement des médias de service public. Ainsi, dans le modèle français, on adopte ce qu’on appelle le COM, (le Contrat d’objectifs et de moyens) tandis qu’en Belgique, les journalistes et les acteurs des médias se mettent d’accord sur un contrat de gestion. «La télévision peut être indépendante, du moment qu’elle fixe un contrat de gestion qui doit déterminer les missions de service public. Ce contrat est également important dans la mesure où il permet la protection des dirigeants et du personnel de la télévision de service public, notamment contre l’arbitraire du pouvoir», a noté Benoit Moulin, avant de conclure : «la neutralité de la télévision tunisienne passe par son respect de la déontologie, puisqu’elle s’adresse à tous les publics et non pas à un seul. Sa vraie mission est de refléter le pluralisme des idées. Pas de liberté sans responsabilité. Si on veut son indépendance, on doit aussi quelque part conquérir sa légitimité.»
Chaïmae Bouazzaoui