La campagne présidentielle algérienne s’est achevée dimanche dernier dans un climat tendu, avec, en toile de fond, des accusations de violences, des manifestations du mouvement anti-Bouteflika «Barakat» ou encore des révélations concernant des faits de fraudes électorales. Tour d’horizon.
«Terrorisme»
Samedi dernier, Abdelaziz Bouteflika a accusé l’entourage du candidat Ali Benflis— et son premier adversaire — d’avoir manigancé des actes de violences lors de certains de ses meetings. Totalement absent depuis l’annonce de sa candidature le 23 mars, le président Bouteflika a pris la parole samedi dernier lors d’une audience télévisée accordée au chef de la diplomatie espagnole, accusant le candidat Benflis de «terrorisme» et d’avoir clairement appelé les candidats à la violence. «Nous prenons acte, ce jour de veille de fin de campagne, de la poursuite de comportements violents de la part de parties hostiles au déroulement serein et transparent de la campagne et de l’élection pour la présidentielle et dénonçons les auteurs de cette violence qui émane de représentants du candidat à la présidentielle Ali Benflis», a indiqué l’équipe de campagne d’Abdelaziz Bouteflika. «Nous avons une armée puissante et des services de sécurités forts, personne ne pourra nous déstabiliser», a menacé Abdelmalek Sellal, le directeur de campagne du président sortant.
Le candidat Benflis, lui, se concentre sur un tout autre combat, la fraude électorale. En effet, depuis le début de sa campagne, Ali Benflis tient un discours ferme concernant la fraude électorale. Il a d’ailleurs promis de «couvrir les bureaux» de vote, et ce, à l’échelle nationale, afin d’éradiquer ce phénomène, voulant rassurer ainsi l’électorat algérien qui a perdu toute confiance en la transparence de la machine électorale. Le candidat Benflis a ainsi appelé, pendant sa campagne, l’électorat algérien à se montrer «vigilant» en déclarant que «ceux qui se sont habitués à spolier la parole du peuple, à détourner sa volonté, veulent garder leurs vieilles habitudes».
Fraudes institutionnelles révélées
L’évènement de cette dernière étape de l’élection présidentielle algérienne, reste la déclaration d’un ancien préfet algérien qui a confié avoir pratiqué la fraude, dans la passé, répondant à des ordres de sa hiérarchie. Ces révélations, qualifiées de «fracassantes» par les médias algériens, viennent secouer la ruche électorale à quelques jours des élections. L’ancien préfet a en effet fait état de «bourrage des urnes» en faveur du président Bouteflika, précisément en 1995. «Les révélations fracassantes sur Chourouk TV de l’ancien wali d’Oran, Bachir Frik, sur la fraude institutionnelle ont choqué l’opinion démocratique. Non pas que l’Algérien découvre aujourd’hui seulement, au détour de ces confidences intimes d’un haut cadre de l’État, que la fraude électorale est inscrite dans la routine du pouvoir algérien. Le phénomène a connu, au cours des scrutins successifs, une telle amplitude qu’on parle désormais, presque avec une certaine banalisation, du «parti de la fraude» consacré comme le premier parti en Algérie», écrivait le journaliste Omar Berbiche dans un édito publié dimanche dernier sur la page du site El Watan.
Ces dernières semaines, les anti-Bouteflika et principalement les actifs du mouvement «Barakat», littéralement «ça suffit», se sont mobilisés lors de manifestations pour faire entendre leurs voix, convergeant vers un même message : non à un nouveau mandat avec Bouteflika. Malgré ces mobilisations de masse, il semble que les résultats de ces élections seront, une nouvelle fois, sans surprise. L’opinion publique paraît convaincue que tout est «joué d’avance», sentiment venant inévitablement grossir le pourcentage des abstentionnistes.
Céline Masfrand