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Les Émirats arabes unis viennent de signer l’achat de 80 avions de chasse Rafale. Un succès politique pour la France, dû en partie au flou sur la stratégie américaine dans la région.
L’industrie française a de la patience. Treize ans après la première évocation de l’achat de Rafale par les Émirats arabes unis, le contrat vient finalement d’être signé par Emmanuel Macron et le prince héritier Mohammed ben Zayed (dit MBZ), ce vendredi 3 décembre à Dubaï. Les Émirats acquièrent 80 avions de chasse pour 17 milliards d’euros. « Une très bonne nouvelle pour la France », souffle-t-on au ministère des Armées, qui voit le carnet de commandes de Rafale se remplir ces derniers mois.
Après avoir vendu 54 modèles à l’Égypte, 36 à l’Inde, 12 à la Croatie ou encore 36 au Qatar, l’avion de chasse français se porte bien et fait souffler un vent de bonnes nouvelles économiques. Au cabinet de Florence Parly, la ministre des Armées, on estime que des milliers d’embauches seront nécessaires pour honorer la commande émiratie, puisque 90% du Rafale est fabriqué sur le sol français.
Au-delà du succès économique, il s’agit d’une victoire stratégique pour Paris, qui se rapproche encore politiquement d’un acteur majeur du Moyen-Orient. Surtout, la France comble le vide laissé par les États-Unis, où Joe Biden, comme Donald Trump avant lui, se désintéresse de plus en plus de la région. « Les Émirats nous ont contactés il y a un an pour obtenir les modèles les plus modernes du Rafale, ceux utilisés par l’armée française, explique le cabinet de Florence Parly. Un facteur politique important est le désengagement américain observé au Moyen-Orient. Beaucoup de pays émettent des doutes sur l’implication des États-Unis et souhaitent prendre en main leur propre sécurité. » L’implication personnelle d’Emmanuel Macron avec MBZ est aussi soulignée au plus haut niveau pour expliquer cet accord.
*L’autonomie stratégique, une priorité des Émirats
Avec ce contrat stratégique, la France apparaît comme une alternative solide à l’omniprésence américaine dans le Golfe, même si les liens avec Paris sont déjà anciens. « Les Émirats arabes unis sont un partenaire de défense de longue date, avec un premier accord de défense signé en 1995, renouvelé en 2009, expose Emma Soubrier, spécialiste du Golfe et professeure à l’Université George Washington. Jusqu’au milieu des années 2000, la France était le principal fournisseur d’armement aux Émirats, avant que les États-Unis ne fassent une entrée en force sur ce marché. Mais les Émirats ont toujours veillé à diversifier leurs fournisseurs, ce qui leur permet d’avoir une autonomie stratégique et de discuter avec la Russie ou la Chine par exemple. »
(L’Express)