Accusée par le président de la commission parlementaire de la bonne Gouvernance, Badereddine Gamoudi, d’être impliquée dans le scandale des ordures importées d’Italie, la Douane tunisienne est revenue sur des détails importants ce mercredi 18 novembre 2020 par la voix de son porte-parole, le Colonel Haythem Zanad, qui s’est exprimé dans La Matinale de Shems FM. Ses propos reflètent la gravité de la corruption et du camouflage de l’information qui règnent dans certaines structures de l’État. En effet, sans l’appui de certains « poids lourds » de l’administration, l’importateur n’aurait pas pu importer ses 70 conteneurs remplis de déchets ménagers, dont l’importation est interdite par l’Union Européenne elle-même.
La société importatrice a camouflé plusieurs données et documents importants
« Il n’y a rien qui prouve l’implication de la douane. Ladite commission parlementaire vient d’entamer son enquête, au même titre que la Justice. La Douane, pour sa part, a même composé avec l’équipe des Quatre Vérités – ndlr : qui a dévoilé le scandale – en lui fournissant tous les détails possibles », a expliqué le porte-parole.
La douane a subi des pressions dans le cadre de cette affaire selon le Colonel. « 5 recours ont été déposés à l’encontre de la Douane, ainsi qu’une plainte. Le Consulat de Tunisie à Naples lui a même demandée des précisions sur cette affaire. Le premier dossier de l’enquête était lacunaire car la société a camouflé plusieurs documents. Elle a, à titre d’exemple, dissimulé le contrat conclu avec les entreprises italiennes, ainsi que les autorisations obtenues de la part de l’Agence Nationale de la Gestion des Déchets (ANGED). Pas seulement : la société a même omis d’affirmer qu’elle avait conclu un contrat avec l’ANGED depuis le 20 février 2020 l’autorisant à gérer les déchets en Tunisie. Or, il s’agit d’une société totalement exportatrice. Par conséquent, elle n’a pas le droit d’opérer sur le marché local », a-t-il expliqué.
La société est désormais appelée à exporter les déchets
Interpellé sur des possibles pressions venant de la part des proches de la société importatrice – ancien ministre de l’Environnement, etc. -, le Colonel Haythem Zanad a affirmé qu’il ne dispose pas d’informations précises et que l’affaire est entre les mains de la Justice. « Depuis juillet 2020, nous avons soupçonné l’existence de contre-vérités. Début novembre 2020, lors d’une réunion au sein du ministère des Finances avec toutes les parties prenantes au dossier, y compris la société, il a été décidé d’amener ladite société à exporter les déchets vers l’Italie. Le dossier, dans ce même contexte, a été transféré à la direction des investigations douanières qui, pour sa part, va dévoiler les infractions douanières », a-t-il indiqué.
Un faux rapport de la société importatrice ?
Comment est-on arrivé jusque-là ? La Douane, selon son porte-parole, a demandé un document certifiant que l’ANGED a donné son accord pour que les déchets entrent en Tunisie conformément aux normes, sachant que les déchets domestiques ne sont pas autorisés. Ainsi, une équipe de l’ANGED s’est rendue au port de Sousse pour analyser un échantillon des déchets le 13 juin 2020.
A cet effet, un rapport détaillé, élaboré par l’ANGED, a été envoyé à la Douane, stipulant que les déchets pouvaient bel et bien entrer en Tunisie et qu’il s’agissait de déchets en plastique. Dès lors, la Douane a déplacé les conteneurs concernés vers les entrepôts de la société exportatrice. « Toutefois, après une évaluation, l’agent de la douane se trouvant au sein de la société a émis des soupçons sur les conteneurs. Il a donc envoyé un rapport stipulant qu’ils ne contenaient pas des déchets en plastiques comme cela a été signalé. C’est à partir de là que tout a commencé », a encore expliqué le porte-parole de la Douane.