(Vidéo) Pots-de-vin, services, faveurs : ces chiffres qui témoignent de l’ampleur de la corruption en Tunisie

Dans la lutte contre la corruption, le Tunisien n’a pas du tout confiance dans les pouvoirs publics. Il est, d’un autre côté, à la fois victime et responsable de la corruption et de la contrebande dans le pays. Ce sont les deux principaux constats que l’on peut établir de la conférence de presse organisée par le cabinet de sondage One To One ce mercredi 30 septembre 2020, pour présenter ses chiffres sur la perceptions de la corruption par les citoyens.

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Les sondages d’opinions, à titre d’information, ont été réalisés du 24 février au 18 mars 2020 sur un échantillon aléatoire de citoyens âgés de 18 ans et plus. Plusieurs données ont été évoquées. A titre d’exemple, 28% des Tunisiens affirment qu’il est normal d’acheter des marchandises de contrebande. « Cela souligne que le citoyen a une certaine part de responsabilité. Il s’oriente, dans ce même contexte, vers des produits à bas prix. Sa situation financière peut expliquer ce fait », a expliqué Youssef Meddeb, patron de One To One.
10% des Tunisiens, poursuit-il, jugent « normal » le recours aux produits de contrebande. Autre donnée intéressante : 32% des citoyens interrogés – dont la plupart des commerçants – ne veulent pas que l’État impose des impôts sur les activités informelles. C’est donc un autre fait qui souligne l’enracinement de la contrebande dans la société.

Corruption : un état d’esprit

On parle, dans ce même contexte, de la « petite corruption » de tous les jours. En effet, durant les 12 derniers mois, les personnes sondées affirment avoir été obligées, au moins une fois, de verser un pot-de-vin ou de donner un quelconque présent. 28% d’entre-elles ont donné un présent pour obtenir un service des policiers. Pis encore : 19% ont payé pour éviter les problèmes avec les policiers. Le patron de One To One affirme, également, que 17% des Tunisiens ont été obligés de verser de l’argent pour obtenir un service de soins, alors que l’accès aux soins est un droit fondamental. Le milieu scolaire n’est guère mieux loti : 6% des citoyens disent avoir été obligés de verser de l’argent pour obtenir un service dans les établissements scolaires publics.

L’impunité qui aggrave les choses

Ces chiffres, comme nous l’avons souligné, témoignent de l’ampleur de la corruption et de la contrebande en Tunisie. Achraf Aouadi, président de l’ONG I Watch, a justement mis ce point en exergue, affirmant que le citoyen connaît, aujourd’hui, « le fonctionnement de la machine », spécifiquement en ce qui concerne la contrebande. « Il faut une bonne gouvernance et c’est ce qui nous manque en Tunisie et nous avons, aussi, besoin de mécanismes sains, ainsi que d’une administration bien gouvernée et digitalisée, bien que ce dernier concept puisse déranger certains », a-t-il expliqué.
Présente, également, lors de la conférence de presse, Rim Gmati, conseillère juridique au sein de l’INLUCC (Instance Nationale de Lutte contre la corruption), est aussi revenue sur l’importance d’une bonne gouvernance. Médias et INLUCC doivent travailler ensemble afin de démocratiser la culture de la lutte contre la corruption. Chose qu’elle a, entre-autres, déclaré à Réalités Online dans le reportage vidéo ci-dessous.
Autre constat établi par les conférenciers, notamment notre confrère de Business News Marouane Achouri : le sentiment d’impunité qui fait des ravages en Tunisie. Ce dernier, explique-t-il, pousse les individus à rendre justice par eux-mêmes car ils craignent que la Justice soit incapable de le faire.

  • Réalisation et montage : Riadh Sahli
  • Travail journalistique : Fakhri Khlissa

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