Retour sur la visite de Saïed en Chine : Abdallah Lâabidi trouve la forme et le principe réussis, mais…

Accompagné de la première dame de Tunisie et d’une délégation officielle, la visite du président de la République Kaïs Saïed en Chine a suscité l’intérêt de l’opinion publique. Et ce, dans la mesure où elle pourrait offrir à notre pays de nouvelles opportunités, des partenariats stratégiques notamment en matière de l’innovation technologique. Les ficelles d’un partenariat stratégique des relations sino-tunisiennes semblent se tisser.

Saïed chez le géant Huawei

Pour récapituler: le samedi 1er juin 2024, le Président de la République Tunisienne a visité la Grande Bibliothèque du Géant technologique Chinois Huawei. Lors de la première étape de cette virée numérique, le Président Saïed et sa délégation ont été reçus à Dongguan pour découvrir la Grande Bibliothèque de Huawei. Accueilli par la conservatrice de la bibliothèque, le Président a certes eu l’occasion d’admirer différents pavillons, mais il a particulièrement découvert le nom de Carthage écrit en lettres d’or et a exploré tout un pavillon dédié à la Tunisie. En un geste habilement symbolique, Saïed a offert un ensemble d’ouvrages tunisiens ayant une valeur historiquement riche à la bibliothèque pour orner davantage le pavillon chinois destiné à la Tunisie et, par ricochet, renforcer les échanges culturels entre les deux pays. C’est ensuite vers le siège principal de Huawei à Shenzhen que le Président Kaïs Saïed s’était rendu. Là, il a rencontré Ren Zhengfei, fondateur de l’entreprise,. Ce fût une occasion pour parcourir diverses unités et de découvrir les multiples innovations technologiques de l’entreprise.

Pour l’occasion, le Président Saïed a souligné que la numérisation est devenue une nécessité absolue dans la mesure où non seulement elle fait gagner du temps à l’administration et au citoyen, mais elle se présente aussi comme un garant de la transparence des services, ce qui barre la route à la corruption. Une présentation détaillée sur les activités mondiales de Huawei a été faite par les représentants de la société tout en se concentrant sur les éventuelles opérations futures en Tunisie. D’ailleurs, tout observateur averti n’aurait pas pu rater l’enseigne d’une « Tunisie verte et numérisée » brièvement montrée sur la vidéo publiée par la page officielle de la Présidence de la République.

BYD expose son savoir-faire

La virée du 1er juin s’est poursuivie à travers une seconde visite de BYD, entreprise chinoise spécialisée dans la fabrication de véhicules à énergie électrique. A ce stade, le chef de l’Etat tunisien, n’a pas manqué d’exprimer un intérêt particulier aux moyens de transport en commun écologiques notamment les bus, les métros et les trains exposés par l’entreprise. « Le transport public est une priorité absolue pour notre pays. Nous devons trouver des solutions rapides et efficaces pour sauver et développer ce secteur, il faut garantir ce droit de manière effective et duquel dépend, entre-autres, la croissance économique », a noté le Président en dialecte arabe.
Plusieurs opportunités offertes par les géants technologiques comme Huawei et BYD ont été présentés au Président Saied qui s’est montré très ouvert à la numérisation et aux énergies renouvelables. D’ailleurs, nombreux sont les experts et autres observateurs avisés qui n’ont cessé d’inciter vers l’exploration de nouveaux marchés et d’envisager de nouveaux partenaires pour la Tunisie afin d’accéder au pallier technologique innovant et pour être au diapason de l’économie écologique et durable qui s’installe de par le monde. Notons que dans les coulisses des experts, l’on chuchote tout bas depuis quelques années déjà, que la Chine est en passe de voler la vedette à ses concurrents. On prédit même que le pays de Confucius se placera certainement en haut du palmarès mondial, ne serait-ce qu’au niveau économique.
Dès lors, au lendemain de cette visite, peut-on aspirer à une avancée significative dans les relations bilatérales entre la Tunisie et la Chine, aussi bien sur le plan diplomatique qu’économique ? C’est justement à ce propos que Réalités Online a interrogé M. Abdallah Lâabidi, ancien ambassadeur et expert en relations internationales.

Sur le bon chemin

D’emblée, notre interlocuteur a dit que sur le plan diplomatique, Saïed n’a pas raté le coche et qu’il a même marqué un point diplomatique en marchant sur les pas de ses prédécesseurs et à s’inspirer du savoir-faire diplomatique de Habib Bourguiba . « Je trouve que Saïed a agi en homme d’Etat qui se respecte. Les relations sino-tunisiennes ont été hélas quasi totalement gelées et congelées durant les années postrévolutionnaires, spécifiquement sur le plan diplomatique. Il était temps de renouer ces liens qui datent de très longue date. De fait, Bourguiba avait entretenu de très bonnes relations avec la Chine. Lorsqu’il y a eu l’incident de la ceinture de Sfax, Bourguiba a fait appel aux chinois pour construire le canal. Ce sont les Chinois qui ont permis le passage de l’eau depuis le Nord vers le CAP Bon du pays. Bourguiba misait beaucoup sur l’entretien de bonnes relations au niveau international, il se faisait respecter par les pays de tous les Continents et savait marcher sur du sable mouvant sans jamais se faire d’ennemis. Dès lors, je qualifie cette visite d’un éveil diplomatique lequel marquera un sursaut dans la réanimation des relations bilatérales. D’ailleurs, la Chine était le premier client de la Tunisie en phosphates. Aujourd’hui, le Président Saïed s’est montré diplomatiquement plus actif et c’est un bon point à retenir », dit-il.

Ce qui reste à faire…

Par ailleurs, notre interlocuteur a noté des manquements dans cette visite considérant qu’on ne peut pas séduire des partenaires en y allant les mains presque vides. « Je loue le geste d’offrir des ouvrages tunisiens. Mais l’homme a besoin d’une bonne équipe autour de lui pour couronner ses efforts avec des résultats palpables et aider la Tunisie à renforcer ses liens avec différents pays. C’est bien de voir des relations se renouer avec la Chine ou la Corée, mais ceci ne devrait pas nous pousser pour autant à ne plus avoir de partenaires en dehors de l’Afrique et de l’Asie ».
L’ancien diplomate trouve alors que sur le principe et sur la forme la visite de Saïed en Chine était globalement encourageante. Il trouve toutefois, qu’il y a encore du travail à faire sur la forme et au niveau des outils tant il faut toujours mettre en place les moyens et la procédure pour atteindre un objectif. « Saïed a toujours cautionné le système social. Mais il ne peut y arriver qu’en mettant les hommes d’affaire et les bailleurs de fonds de son côté ! Il n’est pas du tout facile de conquérir les Chinois qui maîtrisent toutes les ficelles du marché économique et maîtrisent surtout l’art de la négociation sans faire appel à des experts de taille. Le pays n’en manque pas. La Tunisie est riche en compétences chevronnés et expérimentés. Je trouve qu’il faut former une bonne armée de compétences intègres autour du Président».

Abir CHEMLI

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