Yemen: Des enjeux stratégiques ?

Une opération militaire est menée par l’Arabie Saoudite et regroupe un bon nombre de pays arabes et islamiques. Cette coalition, la première dans l’histoire du monde arabe visant un pays arabe et commandée par l’Arabie saoudite, qui ne s’est jamais engagée dans un conflit armé direct sous son commandement, suscite de nombreuses questions sur la forme de cette intervention, ses buts et les enjeux stratégiques qui secouent toute la région.

L’Arabie Saoudite, fer de lance au Yémen

Coup de théâtre, ce jeudi 26 mars, l’Arabie saoudite lance une opération militaire aérienne sur le Yémen baptisée « Tempête décisive ». Initiative qui a surpris de nombreux pays. Selon les responsables saoudiens, l’opération vise à stopper l’avancée des rebelles houthis vers Aden, après que Sanaa était tombée entre leurs mains depuis septembre dernier. Aussi et au vu de l’illégalité des Houthis à la tête de l’Exécutif, cette opération militaire tente de remettre en place le Président et le gouvernement élus. Forte par la résolution de l’ONU, qui avait appelé à un dialogue et envoyé son émissaire spécial, l’opération a été baptisée «Tempête décisive» et a été déclenchée dans la nuit par des frappes saoudiennes sur différentes positions des Houthis, des miliciens chiites. Ces derniers ont au cours des derniers mois pris le contrôle de plusieurs grandes villes, dont la capitale Sanaa.

Armada arabo-islamique

La mobilisation militaire de l’Arabie Saoudite est sans précédent dans l’histoire du royaume : 150.000 militaires, 100 avions de combat et toute la logistique inhérente à l’opération. D’autres pays se sont joints à cette coalition, qui nous rappelle la triste guerre du Golfe :

Les Emirats arabes unis ont engagé 30 avions de combat,

le Bahreïn 15 appareils,

le Koweït 15 appareils,

le Qatar 10 avions.

L’Egypte a, pour sa part, dépêché 4 navires de guerre égyptiens qui sont entrés dans le canal de Suez afin de sécuriser le Golfe d’Aden.

La coalition anti-Houthis et avec l’approbation de nombreux pays occidentaux dont la France, la Grande Bretagne, ne cesse de regrouper des pays « amis » de l’Arabie Saoudite dont la Jordanie, le Soudan, le Pakistan et le Maroc. Les pays occidentaux se gardent de s’impliquer directement dans ce conflit, mais le sauvetage de deux pilotes saoudiens par les forces américaines augure certainement d’une aide logistique de taille qui sera fournie à l’Arabie Saoudite par les USA.

Avec la décision de la Ligue arabe lors du  sommet de Charm Echeikh d’instituer « une armée arabe d’intervention » qui verra le jour dans 4 mois, on imagine un peu la tournure que prennent les événements au Moyen Orient et le conflit, jadis sous-jacent, vient d’éclater au grand jour.

Visées stratégiques de l’opération « Tempête décisive »

L’opération « Tempête décisive » viserait selon les responsables politiques et militaires saoudiens de : « défendre le gouvernement légitime du Yémen et d’empêcher le mouvement radical houthi de prendre le contrôle du pays ». Le chef de la diplomatie yéménite, Ryad Yassine, avait averti que «la chute d’Aden aux mains des Houthis marquerait le début d’une profonde guerre civile».

Tentative d’hégémonie sur le Golfe arabo-persique

Le Yémen est désormais divisé. Le Nord dominé par les Houthis en ligne directe avec la frontière saoudienne ; le Sud par les pro-Hadi. La question est infiniment plus complexe ; il s’agit d’une guerre par procuration menée par les Houthis appuyés par l’Iran. Cette dernière avait vu de mauvais œil l’intervention des Emirats du Golfe en Syrie et qui tente de briser ce « croissant chiite » Iran-Irak-Syrie et le Hezbollah au Liban. Assiste-t-on à la vieille guerre Sunnites/Chiites dont le théâtre est aujourd’hui la Syrie et le Yémen. Le cas yéménite est dangereux pour l’Arabie saoudite, non seulement en raison des frontières directes qu’elle a, mais aussi pour l’étendue des liens tribaux et de sang ; un prolongement naturel de l’Arabie saoudite qu’elle ne souhaiterait aucunement voir basculer dans le camp chiite. Le cas du Bahrein et son soutien en envoyant une force armée vers ce pays, démontre encore une fois les lignes de démarcation que l’Arabie saoudite avaient instaurées pour sa propre conception de la « sécurité nationale ».

L’Iran et les enjeux yéménites

L’Iran soutient tout mouvement chiite contestataire qui voit le jour dans la péninsule arabe. Il n y a qu’à voir l’éternelle dispute entre le Golfe dit persique par l’Iran et dit arabe par les pays du Golfe et même dans le monde arabe.

Le Moyen-Orient vit aujourd’hui une tournure décisive avec le déclenchement de ce conflit armé inattendu.

Fayçal Chérif

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