Zama s’invite au Bardo, lors de la conférence de M. Giovanni Brizzi

 
On ne l’attendait pas, mais la bataille de Zama s’est insinuée lors de la conférence de M. Brizzi à la Salle Sousse du Musée du Bardo, Conférence présentée à l’occasion de l’exposition « Hannibal à Carthage, réalisée sous l’égide de la Présidence de la République.
Outre le majestueux buste d’Hannibal, l’exposition était assez pauvre et très en deçà de celle de la Présidence qui s’est tenue 10 jours auparavant et qui avait le mérite de rassembler plusieurs pièces « guerrières » pour accompagner le buste.
Le musée du Bardo, pourtant propriétaire de toutes les pièces exposées à la Présidence, ne les a pas présentées à côté du buste, il a juste accompagné celui-ci de deux bannières.
En deuxième partie, le Pr. Giovanni Brizzi, spécialiste d’Hannibal, a présenté à la salle « Sousse », dans le sous sol du musée, un tableau assez éloquent du Carthaginois, il a parlé de l’homme, de son œuvre, de ses idées, le qualifiant assez souvent de génie absolu.
Le Pr. Brizzi, auteur d’un « Moi Hannibal » écrit à la première personne, a parlé avec clarté du personnage, de sa famille de sa vie et même de sa tactique. Sauf que Zama s’est invitée à la séance des questions pour ne pratiquement plus en sortir.
Depuis quelques années, Zama fait problème. M. Brizzi a beau parler du plan adopté par Scipion, « fils spirituel d’Hannibal », la chose ne passe pas. Un professeur américain, M. Yozan Mosig, a prouvé en 2012 que le plan de Zama est sorti de la tête d’un écrivain et non de celui d’un militaire. Réponses évasives de M. Brizzi qui en perd son français et préfère s’exprimer en italien. Il ne trouve pas de réponse sérieuse aux problèmes des éléphants, qui à Zama, selon Polybe (le panégyriste de Scipion Emilien), auraient traversé sans encombre les rangs romains pour aller se jeter sur la cavalerie carthaginoise. Or, Tout le monde sait que les éléphants sont conduits par des cornacs armés de martelets et capables, non seulement de les diriger, mais aussi de les tuer. M. Brizzi répond : « Oui, mais les cornacs peuvent être abattu par des lances, et laisser les éléphants éviter le choc ». Explication assez peu convaincante. D’abord, Polybe parle de 80 éléphants, donc de 80 cornacs, ce qui rendrait drôle l’histoire de la lance. Ensuite, ces éléphants sont venus d’on ne sait où puisque dans les deux batailles précédentes, sur le sol de Carthage, ils étaient complètement absents. Enfin, Hannibal, depuis 16 ans, n’utilise pas d’éléphants, alors, que lui aurait-il prit tout à coup d’en utiliser à profusion? Et même si Hannibal l’avait fait, il aurait quand même prévu, au minimum, le coup primaire des lances contre les cornacs.
A la question « pourquoi Carthage a-t-elle signé en 203 av. J.-C. l’armistice avec Scipion sans rappeler l’invincible armée d’Hannibal, qui était alors à 4 jours de navigation (il était alors en Italie), M. Brizzi répond que « cette armée n’était plus si invincible ».
Dans ce cas, pourquoi Scipion voyage-t-il en Tunisie au lieu de combattre Hannibal sur le sol de l’Italie? En vérité, le Sénat de Rome, qui ne croyait pas du tout en Scipion, a refusé de lui confier, fut-ce un seul soldat romain. Scipion est parti chercher en Sicile, des soldats non professionnels ou renvoyés de l’armée depuis plus d’une décennie, pour aller combattre Carthage! Il s’agit probablement d’une armée de circonstance destinée à donner à Carthage l’occasion de signer la paix et éviter ainsi le retour triomphal du Carthaginois. Et c’est exactement ce qui advint. Carthage signa la paix sans rappeler Hannibal qui ne revint à Carthage qu’après la paix.
Selon certaines auteurs, c’est 50 ans après cette paix, une fois que Carthage a été détruite, que les historiographes romains ont inventé une nouvelle déclaration de guerre et une défaite d’Hannibal à Zama.
Zama serait une invention tardive destinée à grandir Scipion et Rome.
Très probablement, la guerre se termina sur un statu-quo. La preuve? Le port militaire punique construit après la guerre. « Comment expliquez-vous que Carthage ait pu construire ce port après la guerre alors que selon Polybe elle n’en avait pas le droit? » M. Brizzi a répondu qu’il était incapable de l’expliquer.
Une chose est sûre, on n’en a pas fini avec la Seconde Guerre punique et encore moins avec Zama.
Débat à suivre entre spécialistes, ce serait un sacré spectacle.
A.B.

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