Le monde connaît aujourd’hui une phase de grandes transformations et de grandes mutations à différents niveaux. Ces évolutions ont remis en cause le monde d’hier et le cadre général de l’organisation du commun et du vivre-ensemble. Dans ce contexte, le monde politique fait partie des domaines qui connaissent les plus grandes contestations et critiques et qui appellent à un changement majeur des modes d’organisation et du fonctionnement de la représentation citoyenne. Il faut rappeler que le régime démocratique a constitué l’horizon de l’expérience politique dans les sociétés modernes depuis de longues décennies. En dépit de la concurrence d’autres régimes politiques comme les régimes socialistes et communistes au cours du 20e siècle, les régimes démocratiques ont réussi à s’imposer comme le cadre hégémonique de l’organisation de la vie politique dans les sociétés modernes. La chute du mur de Berlin en 1989 et la chute des régimes socialistes sont venues renforcer la domination du régime démocratique devenu progressivement le cadre de l’exercice de l’action politique et de la participation citoyenne.
Parallèlement à la chute du mur de Berlin, le « court vingtième siècle », pour reprendre les termes de l’historien britannique Eric Hobsbawm, a connu d’importantes révolutions politiques dans un grand nombre de pays pour sortir des régimes autoritaires et despotiques. Ces révolutions politiques ont fait de la démocratie représentative la voie pour entrer dans l’univers des libertés et de l’universel des Droits de l’Homme. Les derniers arrivants dans ces révolutions politiques sont les pays arabes avec les révolutions du printemps arabe et certains d’entre-eux ont entamé des expériences politiques nouvelles dans le cadre du processus de transition démocratique complexes et difficiles.
Au cours de ces expériences politiques, l’expérience démocratique a pris la forme de la démocratie représentative fondée sur le principe des élections démocratiques et libres et le principe de la représentation. Dans ce régime politique, les corps intermédiaires, notamment les partis politiques, les organisations sociales dont les syndicats et les organisations de la société civile jouent un rôle essentiel dans la dynamique politique et dans l’organisation et la structuration de l’ordre public. Les élections permettent de désigner les représentants du peuple qui appartiennent à ces corps intermédiaires et qui vont définir les grandes orientations et les grands projets ainsi que les priorités des politiques publiques et de l’action de l’Etat au cours de leur mandat.
Les régimes démocratiques ont connu une longue période de succès dans laquelle ils ont réussi à mettre en place et à consolider des régimes politiques stables jouissant d’une grande légitimité. Par ailleurs, ils ont réussi à développer la culture des Droits de l’Homme, de la liberté et de la diversité dans un grand nombre de régions du monde.
Mais, ces régimes démocratiques connaissent depuis quelques années une période d’essoufflement et de crise. Ainsi, le régime démocratique a connu de grandes critiques, voire même un rejet du fait de ses échecs à opérer le changement social, plus particulièrement à réaliser les revendications sociales de ceux d’en bas dans la lutte contre la pauvreté et la marginalisation sociale. Par ailleurs, la coupure entre les élites et les partis politiques d’un côté, et les électeurs et les classes populaires de l’autre a renforcé la crise des régimes démocratiques et ouvert la porte au développement rapide des mouvements populistes. La crise des régimes démocratiques a eu des effets sur la démocratie représentative qui a dominé l’expérience démocratique pendant des décennies.
La crise du régime démocratique et de la démocratie représentative a pesé de tout son poids sur les sociétés modernes qui connaissent aujourd’hui une impasse historique. Cette crise est à l’origine d’un important débat sur l’avenir du système politique et les voies de reconstruction du système démocratique. Ces questionnements et interrogations sont au centre des préoccupations des acteurs politiques, des intellectuels et du débat public sur l’avenir de la démocratie dans le monde.
La question qui est au cœur de ces débats concerne la capacité de nos sociétés démocratiques à échapper à la crise de la démocratie et à reconstruire le régime démocratique sur de nouvelles bases. Plus précisément, serions-nous en mesure de reconstruire la démocratie représentative et établir une nouvelle relation de confiance entre les électeurs et leurs représentants parmi les élites politiques qui exercent le pouvoir par délégation ? La question est de savoir également quelles sont les alternatives possibles pour sortir de la crise de la démocratie représentative et si la démocratie directe est une voie réaliste pour sortir de cette impasse historique.
A suivre …